Au début, c'était humaniste : Bouteflika est malade, âgé et fatigué : cela impose la compassion, la politesse et un début d'interrogation. Puis ce fut comique: Bouteflika est aux «invalides», il mange des gâteaux. Comme dit par un internaute, il reçoit en robe de chambre un Général en civil et un ministre qui lui donne à manger. Puis c'est devenu dramatique : le pays fête son Indépendance pendant que son président est installé pour long séjour chez l'ancien colon, justement. Puis c'est devenu surréaliste : nous sommes devenu le seul pays qui n'a pas de Président et qui prouve que l'on en a pas besoin. Ni Etat, ni coup d'Etat.
Et ensuite ? Ensuite vient une phase obscure, proche de l'inceste ou de la confusion cosmique. Une époque où on ne sait plus «quoi est quoi ?», «où se trouve qui ?» et où la question franco-algérienne devient un trouble des repères : Bouteflika vient en effet d'adresser à Hollande ses meilleurs vœux pour la fête nationale de la France, à partir de la France, à partir de Paris. A quelques mètres l'un de l'autre. Le message qu'on lit et relit sonne étrange, comme un message dans une bouteille mais avec le bouteille que l'on tend de main à main entre deux voisins de palier. Ou comme un homme qui hurle dans l'oreille d'un homme qui a une ouïe parfaite. Ou un homme qui envoie vers la Hollande des messages à Hollande (
Bouteflika et son staff com' ont dû être bien gênés : ne pas envoyer des vœux à la France pendant qu'on est chez elle est une grave indélicatesse. Mais les envoyer pendant qu'on est chez elle, mais comme si on était loin de chez elle, est d'un profond ridicule. C'est à ce genre de situation que l'on aboutit lorsqu'on construit la plus grande mosquée d'Afrique chez soi et pas le plus performant hôpital.
Kamel Daoud
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