Vu de ParisLe sommet Alger-Paris, nouvelle chance algéro-française
Sur le papier, cela ressemble à des fiançailles prometteuses. Durant deux jours, se tiendra à partir du lundi 16 janvier en Algérie, le premier sommet algéro-français. Un peu sur le modèle de ce que la France a mis en place avec l’Allemagne, son partenaire stratégique européen. Cela fait plusieurs décennies que ces deux pays collaborent ainsi régulièrement au plus près.
Après la visite officielle de François Hollande en Algérie, il y a un an, la principale conséquence politique a été de mettre en place ce sommet qui a vocation à se tenir chaque année. L’occasion pour les deux pays de constater les avancées dans différents secteurs, et ce, sous l’autorité des Premiers ministres respectifs.
Bien entendu, en apparence tout est au beau fixe veut-on croire tant à Paris, à l’Hôtel Matignon, résidence de Jean Marc Ayrault, que dans l’entourage d’Abdelmalek Sellal. Et pourtant la raison commande un prudent optimisme tant les deux pays sont passés depuis tant d’années à côté de tellement de chances historiques. Ce fut le temps où Bouteflika -qui en est à son troisième président français- et Chirac promettaient un traité d’amitié en s’embrassant à pleine bouche. Ce traité ne vit jamais le jour, torpillé par une droite française pour qui les gestes symboliques étaient impossibles à l’égard d’un passé qui ne passe pas totalement côté algérien, et ce, encore aujourd’hui. A l’époque, des députés ultra droitiers avaient même réussi à faire voter une loi mémorielle qui attribuait des vertus à la colonisation en Algérie.
Puis, ce fut le temps de Nicolas Sarkozy, son début de quinquennat et sa fameuse Union pour la Méditerranée. On évoquait alors « un axe franco-algérien ». Tout avait ensuite été rapidement délaissé. Ni l’axe, ni cette Union n’avaient résisté à la réalité d’une relation complexe.
Avec François Hollande à l’Elysée, c’est un troisième président qui tente de redensifier la relation bilatérale. Force est néanmoins de constater que pas grand-chose ne s’est réellement passé depuis un an entre les deux pays. L’ambassadeur de France à Alger est toujours un proche de Nicolas Sarkozy aux yeux des Algériens. A Alger, selon les Français, le pouvoir en place est avant tout contesté à quatre mois d’échéances électorales avec un président diminué.
Mais, il y a bien d’autres éléments de blocages entre les deux pays. Côté français, la susceptibilité permanente des Algériens à l’égard des initiatives françaises finit par annihiler toutes les bonnes volontés hexagonales. « On n’ose plus rien proposer ni rien faire de peur de froisser les Algériens », se plaint-on régulièrement dans le personnel politique français pour qui, « il y aura toujours quelque chose à reprocher aux Français quoi qu’on fasse ».
A Alger, croit-on à Paris, on soupçonne en permanence les Français d’avoir un agenda et des intentions cachés. Le désintéressement et la volonté harmonieuse ne sauraient être des qualités françaises dans cette relation bilatérale. Et de comparer avec les Marocains qui auraient, eux, un état d’esprit tout à fait différent, en permanence enclins à pratiquer une diplomatie d’influence dont les Algériens seraient incapables, au-delà d’un rapport de forces permanent.
Dans le même temps, ces questions d’état d’esprit se heurtent à une islamophobie qui gagne du terrain dans l’Hexagone, doublé, osons le dire, d’une forme de racisme anti-algérien latent, à la fois vestige de la guerre d’Algérie dont les acteurs sont encore en vie, sentiment doublé de peurs récurrentes quand le terrorisme des années 90 hantait alors au plus haut point l’imaginaire français avec des Algériens perçus comme une cinquième colonne de barbus sanguinaires.
Au-delà de ces sentiments, les deux pays ont l’un envers l’autre des attentes difficiles à concilier et sur des sujets précis. Alger attend toujours que Paris modifie son regard sur le dossier du Sahara occidental et son soutien inconditionnel au Maroc. Cela vaut également pour la manière dont Alger est envisagé par Paris, le pays souhaiterait être traité en permanence comme l’unique puissance régionale.
Peut-être, les gestes les plus simples à faire pour Paris pourraient-ils se traduire au niveau de la politique des visas, permettant aux Algériens de se rendre en France plus facilement. Mais là encore, la sensibilité politique sur ces questions est élevée alors que l’UMP, le parti de droite concurrencé par le FN, se prépare à une énième convention sur l’immigration qui ne va pas pousser à accueillir en masse des Algériens à Orly, fussent-ils les agents de la fameuse co-localisation.
Cette question des investissements algériens en France est peut-être l’élément le plus nouveau dans la relation. Paris attend que l’Algérie et ses fleurons puissent investir massivement en France pour soutenir une économie française atone, toujours dans la crise. Côté français, on a, par ailleurs, encore du mal à envisager l’Algérie autrement qu’une zone destinée à écouler des marchandises et on rejoint sotto voce les critiques de l’ambassadeur américain sur le 51/49 et les difficultés du transfert de bénéfices à l’étranger.
Autant de sujets de fond ou de dossiers irritants sur lesquels les deux Premiers ministres risquent finalement de peu progresser. Les symboles ne font pas tout. Aujourd’hui, ces sommets sont des premières pierres mais les deux peuples sont-ils prêts à aller plus avant l’un vers l’autre ? On peut en douter légitimement. Il faudrait pour cela des hommes d’État lucides et volontaires. Hollande et Bouteflika ne sont pas du même bois que De Gaulle et Adenauer, le chancelier Allemand qui avait su sceller la réconciliation franco-allemande.
Bien entendu, en apparence tout est au beau fixe veut-on croire tant à Paris, à l’Hôtel Matignon, résidence de Jean Marc Ayrault, que dans l’entourage d’Abdelmalek Sellal. Et pourtant la raison commande un prudent optimisme tant les deux pays sont passés depuis tant d’années à côté de tellement de chances historiques. Ce fut le temps où Bouteflika -qui en est à son troisième président français- et Chirac promettaient un traité d’amitié en s’embrassant à pleine bouche. Ce traité ne vit jamais le jour, torpillé par une droite française pour qui les gestes symboliques étaient impossibles à l’égard d’un passé qui ne passe pas totalement côté algérien, et ce, encore aujourd’hui. A l’époque, des députés ultra droitiers avaient même réussi à faire voter une loi mémorielle qui attribuait des vertus à la colonisation en Algérie.
Puis, ce fut le temps de Nicolas Sarkozy, son début de quinquennat et sa fameuse Union pour la Méditerranée. On évoquait alors « un axe franco-algérien ». Tout avait ensuite été rapidement délaissé. Ni l’axe, ni cette Union n’avaient résisté à la réalité d’une relation complexe.
Avec François Hollande à l’Elysée, c’est un troisième président qui tente de redensifier la relation bilatérale. Force est néanmoins de constater que pas grand-chose ne s’est réellement passé depuis un an entre les deux pays. L’ambassadeur de France à Alger est toujours un proche de Nicolas Sarkozy aux yeux des Algériens. A Alger, selon les Français, le pouvoir en place est avant tout contesté à quatre mois d’échéances électorales avec un président diminué.
Mais, il y a bien d’autres éléments de blocages entre les deux pays. Côté français, la susceptibilité permanente des Algériens à l’égard des initiatives françaises finit par annihiler toutes les bonnes volontés hexagonales. « On n’ose plus rien proposer ni rien faire de peur de froisser les Algériens », se plaint-on régulièrement dans le personnel politique français pour qui, « il y aura toujours quelque chose à reprocher aux Français quoi qu’on fasse ».
A Alger, croit-on à Paris, on soupçonne en permanence les Français d’avoir un agenda et des intentions cachés. Le désintéressement et la volonté harmonieuse ne sauraient être des qualités françaises dans cette relation bilatérale. Et de comparer avec les Marocains qui auraient, eux, un état d’esprit tout à fait différent, en permanence enclins à pratiquer une diplomatie d’influence dont les Algériens seraient incapables, au-delà d’un rapport de forces permanent.
Dans le même temps, ces questions d’état d’esprit se heurtent à une islamophobie qui gagne du terrain dans l’Hexagone, doublé, osons le dire, d’une forme de racisme anti-algérien latent, à la fois vestige de la guerre d’Algérie dont les acteurs sont encore en vie, sentiment doublé de peurs récurrentes quand le terrorisme des années 90 hantait alors au plus haut point l’imaginaire français avec des Algériens perçus comme une cinquième colonne de barbus sanguinaires.
Au-delà de ces sentiments, les deux pays ont l’un envers l’autre des attentes difficiles à concilier et sur des sujets précis. Alger attend toujours que Paris modifie son regard sur le dossier du Sahara occidental et son soutien inconditionnel au Maroc. Cela vaut également pour la manière dont Alger est envisagé par Paris, le pays souhaiterait être traité en permanence comme l’unique puissance régionale.
Peut-être, les gestes les plus simples à faire pour Paris pourraient-ils se traduire au niveau de la politique des visas, permettant aux Algériens de se rendre en France plus facilement. Mais là encore, la sensibilité politique sur ces questions est élevée alors que l’UMP, le parti de droite concurrencé par le FN, se prépare à une énième convention sur l’immigration qui ne va pas pousser à accueillir en masse des Algériens à Orly, fussent-ils les agents de la fameuse co-localisation.
Cette question des investissements algériens en France est peut-être l’élément le plus nouveau dans la relation. Paris attend que l’Algérie et ses fleurons puissent investir massivement en France pour soutenir une économie française atone, toujours dans la crise. Côté français, on a, par ailleurs, encore du mal à envisager l’Algérie autrement qu’une zone destinée à écouler des marchandises et on rejoint sotto voce les critiques de l’ambassadeur américain sur le 51/49 et les difficultés du transfert de bénéfices à l’étranger.
Autant de sujets de fond ou de dossiers irritants sur lesquels les deux Premiers ministres risquent finalement de peu progresser. Les symboles ne font pas tout. Aujourd’hui, ces sommets sont des premières pierres mais les deux peuples sont-ils prêts à aller plus avant l’un vers l’autre ? On peut en douter légitimement. Il faudrait pour cela des hommes d’État lucides et volontaires. Hollande et Bouteflika ne sont pas du même bois que De Gaulle et Adenauer, le chancelier Allemand qui avait su sceller la réconciliation franco-allemande.
Gauthier de Voland
source tsa
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