mercredi 16 avril 2014

ALGERIE. Fin de partie pour l'opposition Barakat ! A la veille de l'élection présidentielle, le mouvement civil d'opposition a tenté d'organiser un sit-in à Alger. Violemment réprimée, l'action n'a pas eu lieu.

La police algérienne a empêché la tenue d'un sit-in contre la réélection attendue du président Abdelaziz Bouteflika, mercredi 16 avril (FAROUK BATICHE / AFP)
Sur l'avenue Mourad Didouche qui mène à la place, la circulation n'a pas été arrêtée, des manifestants ont surgi à chaque coin de rue aux cris de "Vive l'Algérie", un drapeau à la main. A chaque fois, les forces de l'ordre, gourdin à la main, les ont repoussés violemment hors de la foule. Les membres de Barakat ont été dispersés, l'action vient d'être avortée.
Les moments d'affrontements ont cependant continué d'émerger d'un peu partout mais ont été très rapidement contenu. La foule, au gré des bousculades sporadiques, a été entraînée vers la Grande Poste d'Alger pendant que plusieurs membres de Barakat ont été brièvement arrêtés. L'une de leur principale chef de file Amira Bouraoui a été poussée à l'intérieur d'un immeuble, des policiers derrière elle. Une petite dizaine de forces de l'ordre ont interdit l'entrée, jurant qu'il n'y avait personne.

Appels anonymes

C'est la sixième fois depuis 40 jours que Barakat manifeste son opposition à un quatrième mandat d'Abdelaziz Bouteflika pour l'élection présidentielle du 17 avril. "Cette fois, ça été plus violent. D'habitude, nous sommes délogés mais après avoir faire notre sit-in", assure une de membres du mouvement, la main sur le cœur et essoufflée. Le mouvement espérait être au moins un millier. Ils n'étaient que quelques dizaines.
Quelques minutes plus tôt, le stress avait envahi l'équipe. Dans le local de la rue Mourad Didouche qu'elle occupe depuis le 1er mars, Louisa Chenoub, ne le sentait pas. "Il y a des flics partout." "Les policiers, on les connait, ils sont toujours devant l'immeuble. Mais cette fois, il y a des nouvelles têtes. Ils ont ramené un bus rempli et la Brigade d'intervention rapide. Ca va être chaud, Ca va dérailler", prédisait Samy en affirmant qu'il y aurait sans doute des "baltaguia" (personnes payées pour provoquer les violences).
Certains membres ont reçu des appels anonymes pour les dissuader de manifester. Mais pour la veille du scrutin, il était impensable de rester les bras croisés. Le mouvement, crée au lendemain de l'annonce de la candidature d'Abdelaziz Bouteflika, très fragilisé après un AVC, veut continuer à donner de la voix, malgré l'imminence du scrutin.

Un mouvement peu mobilisateur

Il y a quelques jours, il a adopté un avant-projet politique pour l'après 17 avril. "Le mouvement Barakat veut la reprise pacifiquement citoyenne de la république squattée", peut-on lire. Décidé à ne soutenir aucune candidature, le mouvement n'a pas encore vraiment pris de décisions sur les formes d'actions futures. Ali Benflis, challenger du président sortant leur a d'ores et déjà tendu la main.
"Parfois je doute. Est-ce que c'était utile de faire ça, alors qu'on savait que les policiers étaient nombreux ? On veut que le système tombe, mais je ne suis pas sûr que cela va arranger les choses", confie Adnan, membre de Barakat, juste après la dispersion du mouvement. "Ce que nous faisons peut empirer la situation. Les exemples sont autour de nous : l'Egypte, la Syrie… Notre souci n'est pas de déstabiliser l'Algérie. Est-ce que le pays réuni tous les facteurs pour faire sa révolution ? Je ne crois pas. Les dictatures qui sont tombées avaient une économie plus faible que la nôtre. Nous avons le pétrole. Aussi, nous n'avons pas une classe politique crédible pour diriger le pays après et la société civile est embryonnaire. Enfin, il faut l'avouer, nous ne sommes pas populaire auprès du peuple."
Adnan n'ira pas voter. Et si Barakat disparaissait après le 17 avril, il continuera à militer et estime que Barakat a eu au moins le succès de réveiller certains Algériens d'une léthargie alimentée par la peur d'un retour du terrorisme.

Présence des pro-Boutef

Rue Mourad Didouche, les Algérois ne semblent pas vouloir rentrer. Les forces de l'ordre, toujours très présentes, s'occupent maintenant des partisans de Bouteflika qui dénoncent la volonté de Barakat de "foutre la merde". Certains affirment qu'ils ont été payés. L'une se présente comme une citoyenne et s'adresse à l'une des caméras des journalistes venus en nombre. "Je voudrais dire à Amira Bouraoui : 'Est-ce que tu n'as pas honte ?'"
Très vite interpellée par un passant en désaccord, elle répond :
Je suis jeune comme toi. Je ne suis pas une fille du système et ce système ne me profite en rien. Mais j'ai suivi toute la campagne, et je peux te dire que dans l'intérieur des terres, les gens veulent la paix. Et je préfère même un semblant de sécurité."
Akli, 72 ans, canne à la main, regarde l'agitation autour de lui. "Ce n'est pas comme cela que le système va changer. Les gens ont peur. Mais je soutiens les jeunes et nous sommes tous responsables de ce qui arrive à notre pays."
Sarah Diffalah à Alger – Le Nouvel Observateu
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Sur le web : BFM Story: Élection présidentielle en Algérie: Abdelaziz Bouteflika, le candidat fantôme - 15/04

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