jeudi 4 juin 2015

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Le règne de Bouteflika tire à sa fin

Les scénarios d’une succession à haut risque

le 04.06.15 | 10h00 
 
 Abdelmalek Sellal - Abdelaziz Bouteflika - Ahmed Ouyahia

Abdelmalek Sellal - Abdelaziz Bouteflika - Ahmed Ouyahia

Impasse politique périlleuse, perspectives économiques sombres et situation sécuritaire régionale qui met les capacités de défense du pays à rude épreuve. C’est dans ce contexte inextricable que les décideurs s’affairent à organiser au pas de charge une succession à haut risque. Il devient de plus en plus pressant pour les différents pôles du pouvoir d’en finir avec une situation intenable politiquement et insupportable économiquement. Et si l’urgence de changer fait l’unanimité au sein du pouvoir, les divergences persistent sur la marche à suivre et surtout sur le choix des hommes devant assumer les hautes responsabilités politiques, assurent plusieurs sources.

La bataille de la succession est ouverte. Elle fait rage. L’intrigant remaniement gouvernemental témoigne du cafouillage et des désaccords au sommet. En somme, après le mise en coupe réglée du FLN achevant définitivement le processus de «pacification» engagé depuis le putsch contre feu Abdelhamid Mehri et le retour annoncé de Ahmed Ouyahia à la tête RND, arrive le moment de la révision de Constitution – plusieurs fois ajournée – qui devrait baliser le terrain.
A en croire des sources sûres, le chef de l’Etat aurait instruit l’Exécutif, lors du dernier Conseil des ministres, de «préparer les conditions nécessaires pour la révision du texte fondamental le plus tôt possible» qui serait l’ultime étape dans cette marche forcée qui devrait clore le règne désastreux de Abdelaziz Bouteflika.
Si certains acteurs politiques et observateurs réduisent ce mouvement des plaques tectoniques dans le sérail à «un non-événement destiné à occuper le vide politique», d’autres décèlent par contre une mise en marche de la machine de la succession. De toute évidence, les analyses se portent essentiellement sur les éventuels successeurs. Le retour «triomphal» de Ahmed Ouyahia au devant de la scène en reprenant les rênes de son parti est perçu comme un signal fort donné pour «le fidèle serviteur de l’Etat» de se préparer pour l’ultime marche vers le palais. «Il est l’homme de la situation.
Son expérience dans la haute administration lui a permis d’accumuler et d’intérioriser tous les codes de l’Etat et de son fonctionnement», témoigne un ancien compagnon de l’ex-futur chef du RND. L’homme, réputé être proche des militaires et de leur noyau dur, les services secrets, nourrit ouvertement son ambition. Son passage à la Présidence lui a permis de garder un œil sur la conduite des affaires et aussi sur les rapports entre les différents groupes influents.
La réunion prochaine du conseil national du RND, lors de laquelle il sera intronisé, lèvera un tant soit peu le voile et renseignera sur son état d’esprit. Mais pour l’instant, rien n’indique que le chef de cabinet de Bouteflika est l’unique «candidat du consensus». Ses adversaires dans le sérail sont à la manœuvre. L’adoption de Abdelmalek Sellal par l’ex-parti unique dans sa version «néo-affairiste» n’est pas à confinée dans le registre de l’anecdotique. Une fort belle manière de le propulser et de lui donner une autre dimension politique. L’actuel Premier ministre, qui garde jalousement le mystère sur son ambition, est sorti paradoxalement «renforcé» du soutien encombrant d’un FLN plus que jamais contesté.
La rue, l’inconnue de l’équation
Sommes-nous face à deux scénarios et deux candidats pour une seule succession ? Quel est l’homme en mesure de préserver les grands équilibres internes et surtout garantir les intérêts colossaux accumulés sous le règne de Bouteflika ? De toute évidence, la question n’est pas tranchée. En l’absence d’un arbitrage ou d’un homme qui assure ce rôle, comme ce fut le cas du temps de Larbi Belkhir, les différents pôles vont devoir se livrer une bataille de neutralisation.
L’hypothèse d’une troisième voie serait-elle alors envisageable ? Qui ? Un homme nouveau et inconnu ? Le chef d’état-major, Ahmed Gaïd Salah, dont les rapports avec le clan présidentiel connaîtraient une détérioration, n’abandonne son ambition. Lui dont on susurre qu’il serait favorable à une «solution à l’égyptienne» veut se poser en recours.
Pas si évident. Un scénario aussi déraisonnable que risqué, même si le général-major reprend du poil de la bête. Le patron des Tagarins ne cesse de déployer ses forces. Des sources sûres assurent que son état-major se verra dans prochaines semaines certains secteurs relevant du Département de renseignement et de sécurité passer sous sa coupe à la faveur d’une réorganisation «concertée» entre lui et le patron du DRS. Par ailleurs, ce qui « préoccupe » les décideurs serait également la manière avec laquelle sera menée la succession.
Le chef de l’Etat va-t-il se retirer définitivement ou graduellement ? Restera-t-il comme président mais l’essentiel des ses pouvoirs seront transférés vers le Premier ministère dès lors que l’option d’une vice-présidence semble être éliminée ? Rien n’est moins sûr. «C’est une gouvernance au jour le jour » commente un ancien haut responsable. Manifestement, la fin de règne de Bouteflika s’annonce problématique. Cependant, un des scénarios qui visiblement n’est pas pris en ligne de compte dans l’agenda des décideurs serait celui qui viendrait de l’extérieur des salons feutrés du pouvoir.
L’opposition politique réclame fortement «un changement démocratique en associant toutes les forces politiques du pays».
La Coordination nationale pour la transition démocratique et l’Avant-garde des libertés exercent une forte pression. Mais la donne qui pourra bouleverser les scenarii du régime serait celle d’une explosion sociale. Tous les ingrédients y mènent. La rue demeure une inconnue dans l’équation des décideurs. La prochaine rentrée sociale sera insupportable pour les citoyens.
Le gouvernement va monter d’un cran dans l’austérité en prenant des décisions antisociales draconiennes. Des coupes budgétaires sont déjà annoncées. L’incapacité à réduire les importations en raison des engagements internationaux de l’Algérie, et donc de maintenir la facture en hausse, se conjugue avec l’amenuisement des rentrées en devises en raisons de l’effondrement des cours du pétrole et aura un impact économique désastreux aux conséquences politiques fâcheuses.
Hacen Ouali
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