lundi 3 juin 2013

Le mouvement national et le code de l’indigénat

Avant la promulgation du code de l’indigénat proprement dit, plusieurs dispositifs répressifs ont été conçus par le législateur français, afin de permettre aux chefs des « bureaux arabes » de régenter la société algérienne dans un sens qui garantisse son assujettissement total. Ce régime a été renforcé après la révolte de cheikh El-Mokrani, en 1871. Une loi de 1882, adoptée pour sept ans, puis régulièrement reconduite à partir de 1880, définit trente-trois infractions, dont le refus de payer l’impôt, de fournir des prestations en nature, ou l’offense à un agent représentant de l’autorité.
Mais ces législations d’exception n’ont fait, au contraire, qu’exacerber les révoltes populaires. Ainsi, jusqu’au lendemain de la Première Guerre mondiale, des révoltes sporadiques soutenues par la paysannerie éclatent à travers le pays. La lutte contre le code de l’indigénat, le refus de la conscription, le refus de payer l’impôt, de coopérer et même d’accepter l’enseignement en français expriment une forme passive de la résistance à l’oppression coloniale.
Ce code qui traduisait un dispositif législatif et réglementaire discriminatoire avait été institué par la IIe république, pour mieux asseoir la domination coloniale.
Il venait en fait aggraver la situation déjà alarmante des Algériens, dans tous les domaines. Cet esprit de révolte et cette prise de conscience vont aider à forger l’esprit nationaliste chez la nouvelle génération.
Dès sa naissance, le mouvement national algérien a fait de la lutte contre le code de l’indigénat son cheval de bataille. L’Emir Khaled a été le premier nationaliste algérien à avoir soulevé publiquement ce problème.
Dès les années 1920, il tenta de mobiliser autour de lui contre les injustices coloniales et élabora un programmed’action pour lutter contre le système répressif auquel le peuple algérien était soumis. A travers son journal, l’Iqdam, l’association qu’il avait fondée, Fraternité algérienne, et les meetings populaires qu’il animait, il s’employa, avec d’autres, à semer les premiers germes du mouvement indépendantiste algérien, jusqu’en 1925, année de son expulsion d’Algérie.
Lui succédant, l’Etoile nord-africaine, pose dès 1927, dans sa première plateforme de revendication, « l’abolition immédiate de l’odieux code de l’indigénat et de toutes les mesures d’exception », en tête d’une longue liste de mesures immédiates. Suivie, de « l’amnistie pour tous ceux qui sont emprisonnés, en surveillance spéciale ou exilés pour infraction au code de l’indigénat ou pour délit politique ». L’adhésion spontanée et massive du peuple algérien aux idées de l’Etoile nord-africaine amena les autorités coloniales à la dissoudre deux années plus tard.
Prenant le relais, le Parti du peuple algérien, fondé en 1937, et qui portait le slogan « Ni assimilation ni séparation, mais libération », réaffirme les mêmes revendications, militera pour l’abrogation du code de l’indigénat ainsi que de toutes les lois d’exception, avant de formuler plus ouvertement la principale revendication qu’est l’autodétermination du peuple algérien. Le parti sera dissous en 1939, mais l’activisme nationaliste se poursuivra sous d’autres formes, de plus en plus radicales.
Le rôle du MTLD, vitrine légale du mouvement national, continuera à réclamer, entre autres revendications phares, l’abolition du code de l’indigénat jusqu’à l’annonce de son abrogation, en 1947, année où le MTLD remporte les élections municipales, malgré les embûches et les fraudes qui les ont entachées.
Parallèlement à la lutte politique typiquement partisane, le mouvement syndical algérien était, dès son apparition dans sa forme embryonnaire vers la fin du XIXe, confronté aux dispositions d’exception du code de l’indigénat, qui privait, de fait, les Algériens de toute activité syndicale en dehors de la Métropole. Ce n’est qu’après son abolition, en 1947, que les Algériens étaient autorisés à adhérer à un syndicat sur le territoire algérien, où seuls les Européens avaient jusque-là le droit de se mêler de l’activité syndicale et d’être délégués des travailleurs auprès du patronat. Les historiens notent, d’ailleurs, que cette ouverture a permis aux Algériens de devenir majoritaires à la Centrale générale de travailleurs (CGT), seul syndicat à l’époque qui admettait encore les revendications socioprofessionnelles des Algériens.
Adel Fathi         

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire