mardi 22 octobre 2013

22 octobre 1956 : détournement de l'avion des dirigeants du F.L.N




Aérodrome de Rabat-Salé, l'agitation est grande. En bordure de la piste, de nombreuses délégations algériennes sont venues saluer leurs leaders. L'animation est telle que les cinq chefs algériens, les quatres historiques auxquels s'est joint presque par hasard Mostefa Lacheraf, ex professeur d'histoire au lycée Louis-le-Grand et qui a gagné le Maroc trois semaines plus tôt manquent se tromper d'avion en embarquant dans le courrier régulier Rabat-Oran. L'avion qui les attend est un DC-3 bimoteur de 27 places appartenant à la compagnie chérifienne Air Maroc et spécialement affrété par le gouvernement marocain.
A 12h14, ce lundi, Ben Bella, Khider, Aït Ahmed, Boudiaf, Lacheraf montent dans le DC-3. Ils sont accompagnés de dix journalistes. L'avion décolle. Une escale est prévue pour 16 heures à Palma de Majorque. L'avion arrivera à Tunis vers 21 heures... Le voyage est son histoire.Une atmosphère de gaieté régnait à bord, nous a rapporté Tom Brady du New York Times. Très décontractés, les Algériens bavardent avec nous, satisfait de pouvoir bientôt prendre, à Tunis une initiative susceptible de mettre fin à la guerre. Et Eve Dechamps de France Observateur raconte comment Boudiaf envisage les futurs rapports de l'Algérie avec la France : " Il n'y a pas une solution marocaine, une solution tunisienne, une solution algérienne. Il y a une solution nord-africaine parce qu'il y a un problème nord-africain. Nous voulons faire une fédération des trois pays d'Afrique du Nord et, ensuite, conclure avec la France, une alliance étroite. "
Pendant que les cinq bavardent politique avec les journalistes, la tension monte dans le poste de pilotage. Le commandant Gellier vient de recevoir un message des autorités françaises lui enjoignant de gagner Alger. Devant ses hésitations, il lui est précisé que bien que propriété incontestable du gouvernement marocain; l'avion vole toujours sous le registre d'immatriculation français. La suite est bien connue. on s'apperçut pourtant bientôt que la capture des dirigeants du F.L.N. allait avoir les résultats inverses de ceux qu'attendaient les partisans de l'Algérie française. " N'oubliez pas, affirma Bourguiba, que les Français ont l'habitude d'incarcérer leurs interlocuteurs avant de négocier avec eux. "
Mais ce détournement contribua très certainement à intensifier et à prolonger une guerre dont la conférence de Tunis aurait sans doute pu hâter le règlement pacifique.

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