vendredi 11 avril 2014

ALGÉRIELa fraude électorale, c'est officiel

Un ancien haut fonctionnaire reconnaît que le bourrage des urnes en faveur du candidat du système fait partie du déroulement des scrutins en Algérie. Des révélations accablantes à quelques jours de l'élection présidentielle du 17 avril.

Manifestation contre un quatrième mandat pour le président sortant Abdelaziz Bouteflika, le 6 avril à Tizi-Ouzou -AFP/Farouk Batiche
Manifestation contre un quatrième mandat pour le président sortant Abdelaziz Bouteflika, le 6 avril à Tizi-Ouzou -AFP/Farouk Batiche
Une première en Algérie ! Un ancien haut commis de l'Etat reconnaît publiquement avoir participé et contribué à la fraude électorale. L'ancien wali d'Oran, Bachir Frik a expliqué en direct sur le plateau d'une chaîne de télévision privée, Echorouk TV, qu'il a été habitué par les autorités sécuritaires et militaires durant toute sa carrière à favoriser le "candidat du système".
Il avoue qu'il a tout fait, en 1995, pour faire gagner [en plein guerre civile] le général Liamine Zeroual. Pour ce faire, il a présidé une commission composée de représentants des services du renseignement, le DRS, du chef de la région militaire et de la gendarmerie nationale. Comme tous les autres walis, Bachir Frik a pris soin de doter le candidat du système des permanences électorales, de comités de soutien et de toute la logistique nécessaire. Bref, il lève tout simplement le voile sur la complicité de tous les appareils de l'Etat algérien dans le bourrage des urnes et le détournement des voix des électeurs algériens.
Même scénario en 1999 : Bachir Frik a reçu l'ordre de truquer l'élection dans sa wilaya pour faire gagner Abdelaziz Bouteflika. Et qui lui a donné cet ordre ? Un certain Ali Benflis, celui-là même qui prône le changement et la transparence, chef de cabinet à l'époque et directeur de campagne de Bouteflika.
Un menteur demeurera un menteur
Ces révélations font mal, très mal. Elles confirment, certainement, ce que tous les Algériens savaient depuis longtemps. Mais là, ces vérités sont dites sur un ton méprisant et humiliant pour les Algériens. On nous explique enfin que notre parole n'a aucune valeur. Que nos voix sont de simples jouets entre les mains d'un régime obsédé par sa survie. Notre existence est à peine protocolaire dans ce pays où tout se décide d'en haut et à travers des commissions secrètes où personne n'a le droit de discuter les orientations données par le DRS et les autorités militaires.
Ces révélations accablantes interviennent au moment où le régime algérien nous promet des concessions, de la transparence et un avenir différent de ce passé troublant et lugubre. Comment peut-on encore nous raconter des mensonges et mépriser à ce point notre intelligence ? Comment peut-on encore nous demander de croire à la sincérité de ce régime alors qu'il a fallu attendre 2014 pour que l'on nous dise publiquement que toutes les précédentes élections présidentielles ont été "jouées d'avance" ? Et pourquoi en 2014, les mêmes pratiques ne seraient-elles pas reconduites ? Un voleur restera un voleur. Un menteur demeurera un menteur. Un tricheur, même s'il fait son mea culpa, ne pourra jamais être digne de confiance.
La justice est tout bonnement inexistante
Cet ancien wali explique très bien les raisons de cette fraude électorale : "Il y va de l'intérêt de l'Etat et de la Nation." Oui, l'intérêt, le leur, et jamais le nôtre. La nation, la patrie, la leur et jamais la nôtre. Ces décideurs, les hauts responsables du DRS et de l'armée, s'arrogent le droit de définir l'intérêt de notre pays. Enfin, celui où nous vivons, aimons et chérissons. Mais l'intérêt de ce pays ne nous concerne pas. Ils nous le disent clairement. On fraude, on triche, on détourne dans votre intérêt. C'est le comble de l'ignominie. C'est comme si un pervers viole une femme pour lui faire croire qu'il voulait lui prouver son grand amour. On nous a violés et on nous viole toujours. Bachir Frik, cet ancien wali, a eu au moins le mérite de nous expliquer que nous ne pouvons rien décider pour notre pays.
Et puisque tout est joué d'avance, il faut se taire et accepter les règles du jeu. Au nom de "l'intérêt de la nation et de l'Etat", il faut accepter ce viol électoral. Sauf qu'en 2014, ce discours n'est plus tolérable. La posture victimaire ne fait plus l’unanimité des Algériens. Beaucoup d'entre eux comptent bien réclamer leur droit au respect, à la liberté et à la transparence dans la gestion des affaires de l'Etat.
M. Bachir Frik ne sera certainement pas convoqué par notre justice pour enquêter sur ses révélations. La justice est tout bonnement inexistante. Mais ce n'est pas grave. Un jour viendra où nous serons nous-mêmes leurs juges et leur tribunal. Et ce jour-là, vous, les violeurs des urnes et des voix des électeurs, vous serez tous condamnés à la perpétuelle déchéance et jetés dans les poubelles de l'histoire.

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