dimanche 20 avril 2014

INTERNATIONAL

Algérie : Bouteflika réélu sans surprise, mais contesté

Par Les Echos |



+ VIDEO - Abdelaziz Bouteflika a été réélu vendredi président de l’Algérie avec 81,53% des voix. Son principal rival Ali Benflis a recueilli 12,18% des suffrages, et dénonce une élection truffée de fraudes. Il projette de fonder un nouveau parti politique.

Les partisans d\'Abdelaziz Bouteflika fêtaient la victoire avant l\'heure jeudi soir à Alger - AFP PHOTO / PATRICK BAZ
Les partisans d'Abdelaziz Bouteflika fêtaient la victoire avant l'heure jeudi soir à Alger - AFP PHOTO / PATRICK BAZ
C’est officiel : Abdelaziz Bouteflika a été réélu président de l’Algérie avec 81,53% des voix - selon les résultats officiels annoncés par le ministre de l'Intérieur, Tayeb Belaïz - et va entamer un quatrième mandat à la tête du pays. Son principal rival Ali Benflis a recueilli 12,18% des suffrages, tandis que le taux de participation a été de 51,7%, un Algérien sur deux ayant boudé le scrutin. Ali Benflis a déclaré vendredi soir qu’il ne reconnaissait pas la victoire de M. Bouteflika, en dénonçant une élection « planifiée et préparée par une alliance entre la fraude, de l’argent suspect et des médias vendus ».

Ali Benflis va former un nouveau parti politique
Ali Benflis, adversaire malheureux d’Abdelaziz Bouteflika à la présidentielle, a annoncé samedi qu’il comptait jeter les bases d'un nouveau parti politique, lequel ouvrira ses portes notamment aux jeunes.
M. Benflis, qui a recueilli 12,18% des suffrages, a ainsi entamé des « concertations »pour créer prochainement une nouvelle formation politique en vue de « capitaliser la dynamique créée par la campagne électorale », a précisé l’un de ses proches, Lotfi Boumghar. « Les jeunes auront un rôle majeur dans ce projet et dans la direction de la future formation politique », a-t-il ajouté.
Les Algériens ont voté alors que plusieurs incidents de fraude ont émaillé la soirée. Vendredi, Ali Benfils a dénoncé « un bourrage des urnes sans précédent » en faveur du président sortant. « Je ne reconnais pas le résultat » annoncé, car « le reconnaître c'est se rendre complice de la fraude », a-t-il déclaré dénonçant une « alliance entre la fraude, l'argent suspect et des médias vendus ».
Jeudi soir à 22h, les premières indications officieuses donnaient Bouteflika gagnant. Et son principal conseiller n’avait pas attendu la publication officielle des résultats pour proclamer sa victoire, donnant lieu à des scènes de liesse vendredi matin à Alger. « Notre candidat a gagné », avait déclaré jeudi en fin de soirée à Reuters Abdelaziz Belkhadem, représentant personnel du chef de l’Etat. « Cela ne fait aucun doute, Bouteflika a remporté une victoire écrasante », avait-t-il ajouté, sans plus de précision.
Le président sortant Bouteflika, jeudi, en train de voter - AFP PHOTO/FAROUK BATICHE
Le président sortant Bouteflika, jeudi, en train de voter - AFP PHOTO/FAROUK BATICHE
Au pouvoir depuis 15 ans mais physiquement diminué depuis son accident vasculaire cérébral du printemps 2013, le président algérien était, à 77 ans, le grand favori de l’élection face à une opposition divisée entre boycott et participation au scrutin. Totalement absent pendant la campagne électorale, Abdelaziz Bouteflika a voté dans un fauteuil roulant dans son bureau du quartier algérois d’El Biar, ne faisant aucune déclaration et serrant brièvement les mains de quelques sympathisants avant de repartir. C’était sa première apparition publique depuis des mois.

Des apparitions publiques très rares

Le président algérien a été admis en avril 2013 à l’hôpital militaire du Val-de-Grâce à Paris où il a passé trois mois avant de rentrer dans son pays pour y poursuivre sa convalescence. Mais depuis lors, ses apparitions publiques sont restées très rares et ses adversaires n’ont pas manqué de s’interroger sur sa capacité à diriger l’Etat.
Malgré sa faiblesse physique, Abdelaziz Bouteflika conservait plusieurs atouts dans sa manche pour s'assurer une confortable victoire lors de cette élection. Il dispose toujours du soutien d’une large partie de la population inquiète de voir ressurgir les violences islamistes qui avaient fait quelques 200.000 morts pendant la « décennie noire » des années 1990. « L’Algérie profonde a confiance en Bouteflika », déclarait durant la campagne Abdelmalek Sellal, qui a quitté ses fonctions de Premier ministre mi-mars pour diriger la campagne d’Abdelaziz Bouteflika. « Les gens, ajoutait-il, ne veulent pas aller vers "l’aventurisme". »

Un gage de stabilité

Au pouvoir depuis 1999, la réélection de Bouteflika est perçue comme un gage de stabilité dans un pays où une partie de la population redoute de vivre les répercussions troublées des mouvements du « Printemps arabe » en Tunisie et en Libye voisines ou encore en Egypte. « Aucun pays n’est parfait à 100%, mais les choses qu’il a faites, il les a bien faites », a estimé un ingénieur à la retraite, qui a voté pour le président sortant.« Je sais qu’il est malade, mais je vote pour lui, pour ce qu’il a fait pour nous. Et il est toujours en mesure de gouverner ».

Les bons vœux de François Hollande, Mohammed VI et Xi Jinping
Le roi du Maroc, Mohammed VI, a félicité le président réélu, estimant que sa victoire traduisait « la volonté pressante » du peuple algérien « d’aller de l’avant dans le processus de développement » du pays.
Dans un bref communiqué publié vendredi soir par l’Elysée, François Hollande a souhaité « un plein succès » au président Bouteflika « dans l’accomplissement de sa haute mission ».
« Dans l’esprit d’amitié et de respect qui existe entre les deux pays, compte tenu des liens humains exceptionnels qui les unissent, la France forme des voeux chaleureux pour la prospérité de l’Algérie », indique le texte, qui précise que « la France réitère sa volonté de continuer à travailler avec les autorités et le peuple algériens à l’approfondissement de la relation bilatérale, au service du développement des deux pays ».
Enfin, le président chinois Xi Jinping a lui aussi adressé ses félicitations à Abdelaziz Boutefilika. La Chine et l'Algérie entretiennent de bonnes relations depuis 55 ans et l'établissement de relations diplomatiques entre les deux pays, a indiqué Xi Jinpin dans un message de félicitations. Les deux pays ont, par ailleurs annoncé en février dernier l'établissement d'un partenariat stratégique global.
Sa réélection pourrait être l’occasion d’organiser une transition en douceur, une stratégie qui a les faveurs des Américains et des Européens soucieux de maîtriser les mouvements islamistes dans la zone saharienne. « Il organise le transfert vers une république nouvelle. Il veut faire le transfert générationnel et il va le faire. On ne peut pas assurer aussi facilement un transfert », affirmait encore Sellal lors de la campagne. En 2004, Bouteflika avait été réélu avec 85% des voix, un score qu’il a porté à 90% cinq ans plus tard, lors de la précédente élection présidentielle qui, selon l’opposition, avait donné lieu à une fraude « industrielle ».

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