vendredi 29 décembre 2017

Algérie. Tamazight, une cause culturelle et démocratique

Algérie. Tamazight, une cause culturelle et démocratique

Début décembre, des milliers de manifestants ont défilé pour la reconnaissance effective de la langue berbère. DR
Début décembre, des milliers de manifestants ont défilé pour la reconnaissance effective de la langue berbère. DR
La revendication politique et linguistique berbère revient au premier plan du débat politique. Une question posée à toute l’Afrique du Nord.
Un pays peut-il tenir ad vitam aeternam à distance une part de lui-même ? Début décembre, la question amazighe – berbère – s’est rappelée sans crier gare au souvenir des dirigeants algériens. Pendant plus d’une semaine, des milliers de lycéens et d’étudiants sont descendus dans les rues de Vgayet (Bejaïa), Tizi Ouzou ou Tuviret (Bouira) pour exiger la reconnaissance effective du tamazight, le berbère, comme langue nationale et officielle, et, surtout, des moyens pour la généralisation de son enseignement sur tout le territoire algérien. De quoi rappeler, dans cette région rebelle, les mobilisations sociales, politiques et culturelles du printemps berbère de 1980 et du printemps noir de 2001. Ce qui a mis le feu aux poudres ? Le rejet par les députés de la majorité présidentielle d’un amendement au projet de loi de finances 2018 prévoyant des moyens pour l’enseignement du tamazight, déposé par une députée du Parti des travailleurs (PT).

Un enjeu politique qui peut rassembler et unifier

Du côté du pouvoir, on préfère voir dans ces manifestations un éphémère feu de paille. Le premier ministre, Ahmed Ouyahia, s’en est pris vertement, il y a quelques jours, aux contestataires : « Ceux qui prétendent que l’État a oublié le tamazight sont en train de mentir au peuple. Ils veulent semer l’anarchie et emprunter d’autres chemins pour allumer un brasier. » Une vulgate nationaliste que conteste le producteur de cinéma Yacine Teguia, secrétaire général du Mouvement démocratique et social (MDS), qui voit dans ce combat culturel un enjeu démocratique. Pour lui, « la Constitution algérienne, même si elle reconnaît le tamazight comme langue nationale et officielle, continue de privilégier la langue arabe, toujours seule langue d’État » et, surtout, « les moyens nécessaires à la promotion de la production culturelle, artistique, littéraire, scientifique dans cette langue manquent toujours cruellement ».
Dans un appel publié ces jours-ci, une soixantaine d’intellectuels et de militants voient dans la reconnaissance de la langue et de la culture berbères une « cause nationale ». « Malgré toutes les campagnes de diabolisation et d’acculturation engagées par les colonialismes, mais aussi par les pouvoirs successifs depuis l’indépendance à l’encontre de cette culture ancestrale, le tamazight demeure une cause commune sans laquelle l’Algérie ne peut se rassembler et s’unifier », insistent-ils. Le tamazight, cause commune, une question posée à toute l’Afrique du Nord, de Casablanca à Tripoli…
ROSA MOUSSAOUI
JEUDI, 28 DÉCEMBRE, 2017
L'HUMANITÉ

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