Les parlementaires algériens sortent silencieusement du palais des Nations, ce 20 décembre, après avoir applaudi poliment. Pas franchement emballés par le discours de François Hollande. "Il aurait pu aller plus loin dans les excuses", déplore un élu. Mais pas totalement déçus non plus. "Il a fait le maximum de ce qu'il pouvait faire", glisse un autre député, implanté dans l'Ouest du pays, qui a trouvé la position française pragmatique. Pour son premier rendez-vous avec l'Histoire franco-algérienne, le chef de l'Etat français a fait oeuvre d'équilibrisme, s'échinant avant tout à décevoir le moins possible.
La visite avait été minutieusement préparée, les mots soigneusement pesés. Pas de "repentance" dans le discours, mais la reconnaissance des "souffrances" infligées par le système colonial et le voeu que les historiens des deux pays travaillent ensemble sur les archives de la guerre d'Algérie, afin que vérité soit faite sur "la violence, l'injustice, les souffrances, la torture". François Hollande a également rendu hommage aux Français qui avaient, à l'époque, pris le parti de l'indépendance de l'Algérie, ou dénoncé la torture, à l'instar de François Mauriac dans les colonnes de L'Express. Le tout sans lyrisme -le président n'a pas voulu faire dans le pathos ou dans la confidence, lui qui a commencé sa carrière à Alger, comme stagiaire à l'ambassade d'Alger.
Pas vraiment passionné par les dossiers internationaux, François Hollande est surtout apparu, tout au long de sa visite, appliqué, soucieux de bien faire et notamment de ne rien dire qui puisse froisser les autorités algériennes. Parfois jusqu'à l'excès de prudence, comme lorsqu'il a repris à son compte la thèse officielle de ses hôtes selon laquelle l'Algérie resterait à l'écart du printemps arabe parce qu'elle a en réalité devancé le mouvement de plusieurs années...
C'est une foule en liesse qui a d'ailleurs accueilli le socialiste à son arrivée sur la place Maurice Audin, où le chef de l'Etat a fait une halte en fin de matinée. François Hollande tenait à saluer la mémoire de ce jeune mathématicien français torturé par l'armée française. Il s'avance face à la stèle. Aux balcons, les Algérois se sont massés. On entend des youyous des femmes. Puis, l'hommage se poursuit par un vrai bain de foule, rare moment d'émotion et de chaleur de la visite.
Après le passé, l'avenir. Le chef de l'Etat s'est ensuite rendu à Tlemcen, dans l'ouest de l'Algérie. Reçu à l'université de cette ville, il s'est adressé à la jeunesse algérienne devant un parterre essentiellement composé d'universitaires. Après un discours assez convenu le président s'est brièvement entretenu avec quelques étudiants. Une vingtaine de jeunes gens un peu intimidés, habillés sur leur trente et un, qui lui ont poliment demandé de leur ouvrir plus grandes les portes des universités françaises. Bourses, stages, échanges : le chef de l'Etat leur a répondu qu'il entendait en effet faciliter la délivrance de visas "limités dans le temps", notamment pour les étudiants. En Algérie, la moitié de la population a moins de 26 ans qui se soucie bien davantage de son avenir que du passé.
Par Dominique Lagarde et Marcelo Wesfreid in l'Express.

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