C'est qu'on est habitué à ne pas voter, à ne pas élire et à être à peine consulté et souvent manipulé. Mais on n'est pas habitué à ce que ce pays soit sans électeurs et sans décideurs. C'est inédit : on a eu des décideurs avant même d'avoir un pays et là on se retrouve avec un pays sans décideurs. Du vide sous le cheveu et personne qui veut ouvrir sa bouche en premier et lever l'index avant les autres. Bouteflika est-il si terrible ? Redoute-t-on l'homme et sa vengeance ? Presque pas. Il s'agit surtout d'une sorte de neurasthénie. Une chute du muscle et de la volonté. Une baisse de la volonté de vivre. Une fin. Quelque chose qui ressemble à un affaissement de l'intérieur. Une baisse de la libido. Un manque de vision. C'est comme si certains n'avaient plus envie de posséder ce pays et d'en être propriétaires. Qu'allons-nous devenir ? Libres dans un terrain vague ? Enfin ?
Et plus on grimpe dans les échelles des «sources» et de l'information et plus on découvre que personne ne sait ce qui va se passer, si Bouteflika va remplacer Depardieu en France et si Depardieu va le remplacer ici, ou si Benflis va vraiment être rappelé ou si les islamistes ne vont profiter du vide comme ils le font toujours. Rien. L'Algérie est enfermée dans une tête et cette tête est enfermée dans une chambre et cette chambre est en France et personne n'a la clef.
Le règne de Bouteflika a tué les « Décideurs » mais en même temps, il n'a pas donné naissance à des électeurs. Résultat ? Rien. Et donc ? Il faut saluer au moins un autre Algérien : le maire d'Alger qui essaye de faire revivre Alger la nuit. De faire oublier le cauchemar de la guerre et de rendre la nuit aux Algériens, par des actes concrets, des parades et des actions. Bettache Président ? C'est du Valide.
Kamel Daoud
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