Hocine Aït Ahmed (2): de l'enlèvement aux accords d'Evian
Retiré de la vie politique depuis le printemps 2013, Hocine Aït Ahmed a donné plus de 70 ans de sa vie à lutte indépendantiste puis à l’opposition démocratique en Algérie. L’histoire d’un pays dans le portrait d’un homme, deuxième partie.
Le détournement de l’avion des Cinq
Le rendez-vous a été donc pris pour se retrouver rapidement dans la capitale espagnole. Cela sans compter sur l’arrivée d’un imprévu d’envergure. Moulay Hassan (futur roi Hassan II) a été chargé par son père, le roi Mohamed V, d’organiser le voyage d’une délégation du FLN vers Tunis pour prendre part à une conférence maghrébine autour de l’indépendance de l’Algérie et sa relation future avec le Maroc et la Tunisie. Le 22 octobre 1956, en effet, cinq responsables du FLN prennent un vol Rabat-Tunis. Aït Ahmed, chef de délégation, est accompagné par Ben Bella, Boudiaf, Khider et Lacheraf. L’avion est détourné, d’une manière à la fois douce et spectaculaire, vers Alger. A vrai dire, « cet acte de piraterie caractérisé, en violation du droit international », comme le qualifie souvent Si L’Hocine, a été très bien préparé par les autorités coloniales. De fait, plusieurs rumeurs circulaient depuis cette date à propos d’une trahison dont auraient été victimes les leaders du FLN.
Les cinq responsables du FLN, après le détournement de leur avion, en 1956.
Ben Bella, par exemple, a émis plusieurs fois des doutes sur la loyauté des Marocains. Il déclare ceci à la radio France Culture: « Nous devions aller avec le sultan du Maroc dans son avion, puis il y a eu un changement de programme. On nous a dit: vous n’allez pas dans l’avion de Mohammed V car il y a son harem. Vous irez dans un autre avion ». En 2008, des accusations graves et affirmatives, cette fois-ci, viennent de l’écrivain et journaliste égyptien Mohamed Hassanein Heikal, ancien directeur d’Al-Ahram. Ce dernier a accusé, sur Al-Jazzera, le pouvoir marocain de l’époque, notamment le prince Hassan, d’avoir livré les « Cinq » au gouvernement de Guy Mollet.
Évoquant « le devoir de mémoire et de vérité », Hocine Aït Ahmed accepte de livrer sa version des faits sur la chaîne franco-marocaine Midi1Sat:
Il explique qu’après l’arraisonnement de l’avion Air Atlas - Air Maroc, le souverain chérifien était très en colère. « La réponse du roi Mohamed V était ferme. Il a dénoncé fermement cet acte. Il faut rappeler quand même qu’il a proposé son fils (le prince héritier Hassan) comme otage en échange de nous », admet-il encore. L’historique chef du FLN explique que même le futur roi Hassan II a été très dévoué à la cause algérienne, avec cet argument: « Je devais faire venir un bateau d’armes des Etats-Unis au Maroc, et je me suis adressé au prince héritier Moulay Hassan qui m’a dit: je vous donne la licence et je vous autorise à faire ça ».
Enfin, il affirme que c’est lui-même, en sa qualité de chef de délégation, qui a réclamé de voyager dans un deuxième avion, en pensant que c’était très risqué d’exposer le roi Mohamed V, sachant que le Sdece (Service français de documentation extérieure et de contrespionnage) guettait de près les chefs du FLN à Tunis, à Rabat et au Caire. « Le prince Hassan a transmis, au roi Mohamed V, ma crainte lorsqu’ils ont décidé que nous partions ensemble dans le même avion que le roi. Je les ai mis en garde contre les risques qu’encourait le roi Mohamed V et suggéré de prendre un autre avion », a précisé Aït Ahmed avec assurance.
Il profite de cette tribune pour rappeler les objectifs visés par ce qui devait être la conférence maghrébine de Tunis pour la paix (en plus du FLN et du roi Mohamed V, le président tunisien Habib Bourguiba devait être présent aussi). L’artisan de Bandung poursuit son témoignage télévisé: « Je me suis confié à une journaliste française en lui disant que désormais l’affaire de l’indépendance de l’Algérie, ce n’est plus le monopole des Algériens mais de tout le Maghreb. C’est notre nouvelle stratégie. Avec tout le Maghreb uni, les rapports de forces changeront… J’ai profité de cet entretien pour lui donner le document des résolutions de la Soummam ». Cette journaliste française qui a fait le voyage avec les « cinq historiques », à bord du Douglas DC-3, s’appelait Eve Paret-Deschamps. Lors d’un épisode des «Dossiers de l’écran», émission diffusée sur Antenne 2 (France 2), le 4 mai 1982, Paret-Deschamps, face à face avec Aït Ahmed, relit ce qu’il lui déclara 26 ans auparavant: « Les conversations que nous avions eues, à Rabat, avec le roi Mohamed V étaient très utiles. Nous avons eu un débat sérieux pour une solution d’ensemble, qui pourrait être proposée à un gouvernement vraiment désireux de négocier. Il n’y a pas une solution marocaine, une solution tunisienne, une solution algérienne ; il y a une solution nord-africaine parce qu’il y a un problème nord-africain. Nous voudrions faire une fédération des trois pays de l’Afrique du Nord, et après conclure avec la France une alliance étroite ». Selon plusieurs acteurs et sources historiques, dont Mustapha Lacheraf, les seuls traîtres dans cette affaire sont le pilote et l’équipage qui étaient tous français. Ils ont fini par céder aux pressions et au harcèlement du Sdece.
Le GPRA et les accords d’Evian
En prison, Aït Ahmed continue la lutte à sa manière. Il a entretenu une correspondance régulière, jusqu’à l’indépendance, avec les chefs de la révolution en liberté. Selon Redha Malek, « l’idée de créer le gouvernement provisoire, comme action radicale et point de non-retour vers l’indépendance, est venue de Hocine Aït Ahmed ». Le leader emprisonné suivait les conflits de chefferie qui risquaient de casser la révolution à tout moment. Ce qui posait problème, c’était surtout le fait que beaucoup de responsables influents refusaient de se soumettre aux résolutions du congrès de la Soummam et aux ordres du CCE (Comité de coordination et d’exécution), créé par Abane. Alors, Aït Ahmed propose de dissoudre le CCE au profit d’un gouvernement provisoire algérien qui sera l’instance exécutive suprême de la révolution. Lors d’une réunion du Conseil national de la révolution (CNRA), tenue au Caire en août 1958, cette proposition a été effectivement concrétisée. Le 19 septembre, Ferhat Abbas fait sa première déclaration en tant que président du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA).
Le GPRA s’imposa rapidement comme le seul porte-parole légitime de la révolution. Mais en réalité, la lutte fratricide perdurait: ceux qui étaient contre les résolutions de la Soummam l’étaient encore davantage contre le GPRA. Hocine Aït Ahmed raconte sur la chaîne française Histoire que « pendant les négociations entre le GPRA et le gouvernement français, la crise latente, qui existait entre le haut commandement de l’armée aux frontières marocaines et aux frontières tunisiennes, commence à paraître. C’est à ce moment là que les militaires commencent à prendre des initiatives politiques très fortes. Ils ont manifesté leur désaccord avant la signature des accords d’Evian. C’était pour nous, un devoir de rappeler à l’ordre l’Etat-major. Donc nous avons écrit aux dirigeants militaires pour leur dire que c’est une erreur politique grave que d’avoir ouvert une crise au moment des négociations. Et nous avons écrit une lettre de soutien à Benkhedda ».
Dans ce cadre, HAA dévoile l’une des premières conspirations politiques orchestrées contre le GPRA par le colonel Houari Boumediene, chef de l’État-major général (EMG) créé en 1959. Mal connu dans la société algérienne, Mohamed Bouhkarouba commença à chercher le soutien des «Historiques» emprisonnés en France. « Boumediene a envoyé Bouteflika recruter un historique. Ils voulaient d’abord convaincre Boudiaf de les rejoindre. Boudiaf leur a dit: “Qu’est-ce que c’est que cette initiative que vous prenez ? Vous divisez le pays. Au moins il fallait être en position de force au moment des négociations”. Il a été très dur à l’égard de l’Etat-major. Donc out... le nom de Boudiaf est éliminé. En ce qui me concerne, il n’était pas question de m’en parler, ils connaissaient déjà mon point de vue idéologique. Ils se sont rabattus sur Ben Bella », avance le futur ministre d’Etat, toujours pour la chaîne Histoire. Redha Malek, l’un des négociateurs des accords d’Evian, affirme aussi que « Boumediene était contre les accords d’Evian dès le début des négociations ». Quant à Aït Ahmed, il a soutenu ces accords et le GPRA. Dans un document vidéo diffusé par l’Ina.fr,il admet qu’il « était pour les accords d’Evian car ils permettaient d’abord à l’Algérie d’accéder à l’indépendance. Et en suite, ce qui est plus important, éviter la partition. Mon cauchemar, c’était la partition ».
Signature des accords d'Evian, mars 1962.
Aussitôt les accords d’Evian signés, le 19 mars 1962, Aït Ahmed et tous les prisonniers politiques ont été libérés. Soulagé de retrouver son pays, il décrit, dans un autre témoignage, la satisfaction du peuple algérien du cessez-le-feu: « C’était un instant de bonheur, et surtout de voir la joie, le déferlement d’enthousiasme et les danses ! C’était une atmosphère presque magico-métaphysique. C’était extraordinaire. C’était irréaliste de voir les femmes enlever leurs voiles et se mettre en jupon et aller embrasser les hommes ». Cette ambiance festive est vite gâchée par les attentats terroristes de l’OAS et la lutte des «Chefs» de l’été 1962.
La lutte des clans et l’indépendance confisquée
Alors que rien n’allait plus entre le GPRA et l’EMG depuis 1961, malgré le remplacement de Ferhat Abbas par Benkhedda, les désaccords vont encore s’aggraver davantage dès avril 1962. C’est en ce mois que les cinq historiques seront unis pour la dernière fois. Boumediene les reçoit à l’Etat-major mais ne veut rien céder à quiconque. Pourtant, ayant compris l’alliance Boumediene-Ben Bella, Aït Ahmed a sollicité la médiation de Jamal Abdel-Nasser, très influent sur les deux alliés. Interrogé dans « Algérie été 1962: l’indépendance à deux visages », film documentaire réalisé en 2002 par Jean Michel Meurice et Benjamin Stora, le fondateur du premier parti d’opposition au régime de Ben Bella assure: « Personnellement, j’ai fait des efforts pour que nous rentrions unis (au pays). J’ai profité de ma présence au Caire, lors de la réunion du Groupe Africain de Casablanca (le GAC est l’un des ancêtres de l’actuelle Union africaine. Fort probablement, Aït Ahmed parle de la deuxième session du comité économique de ce groupe, tenue entre le 26 mars et le 2 avril 1962.), pour aller voir Nasser, avec l’autorisation du chef du gouvernement. Je lui ai dit: “si jamais cette crise atteint l’Algérie, vous ne seriez pas gagnant, Ben Bella aussi, personne ne sera gagnant. Ce sera l’atomisation. S’il vous plaît, faites quelque chose. Moi, je suis prêt à soutenir un remaniement possible du GPRA pour mettre à sa tête Ben Bella. Mais de grâce, il faut intervenir parce que ce qui risque de se produire en Algérie, c’est du nihilisme si on dérive vers la guerre civile” ».
« Algérie été 1962: l’indépendance à deux visages », par Jean-Michel Meurice et Benjamin Stora (2002).
La division entre les différentes fractions à la tête de la révolution va s’éterniser et se concrétise avec l’entêtement de Ben Bella, fort du soutien de l’Etat-major, qui a tout fait pour convoquer un congrès du CNRA. Il aura ce qu’il demande pour le 27 mai 1962. La réunion se tient à Tripoli. Seuls les responsables de l’Algérois (la wilaya IV) s’opposent clairement au Congrès de Tripoli et réclament sa tenue à l’intérieur du pays. Aït Ahmed de son côté était contre mais il a fini par y participer. Il s’explique sur ce point en ces paroles : « j’étais contre la réunion du CNRA à Tripoli. Pour moi, ce qui était important, c’était d’envoyer tous les cadres disponibles à l’intérieur du pays, surtout qu’il y a eu la lutte contre l’OAS. Une fois en Algérie, il fallait créer des conditions et des préparations démocratiques du congrès du FLN. C’était ça ma vision. Je m’y étais opposé mais minoritaire. »
Le premier point de l’ordre du jour était de valider les accords d’Evian. Le CNRA, en effet, a voté unanimement la signature des accords d’Evian. Aït Ahmed raconte que Redha Malek et Ben Yahia se sont même autocritiqués en expliquant qu’ils ont dû faire des concessions durant les négociations pour accéder à l’indépendance. Selon lui (et c’est ce que confirme souvent Ali Haroun): « 30 membres ont voté contre dont Boumediene et Si Nacer (nom de guerre du colonel de la wilaya III Mohammedi Saïd, soutien indéfectible de Ben Bella) en disant que les négociateurs ont vendu l’Algérie à la France ». Le zaïme se souvient deux anecdotes très descriptives de l’ambiance régnant lors des travaux de ce congrès: « Nous avons adopté la plateforme. Après l’adoption, deux notes folkloriques: Ferhat Abbas crie et dit, en montrant la plateforme: “ça, c’est du communisme mal digéré”, mais il l’a votée quand même. Et Si Nacer a dit, en faisant le salut de la main, après l’adoption de la plateforme à l’unanimité: “Heil Hitler” ».
A l’entame du deuxième point de l’ordre du jour, c'est-à-dire la désignation du bureau politique, l’entente a été impossible et les travaux ont été levés sans jamais reprendre depuis le 7 juin 1962. Selon Ali Haroun, « l’ambiance a été surchauffée. Des mots regrettables ont été prononcés par certains. Pour calmer les esprits, Omar Boudaoud, président de la séance, a suspendu les travaux en annonçant qu’ils reprendraient le lendemain. Depuis ce jour-là, le CNRA ne s’est jamais réunis de nouveau. Donc il n y a pas eu de vote au congrès de Tripoli pour élire une direction, majoritairement et démocratiquement. Il n y a eu plus de représentation politique du FLN, légitime et acceptée par tous ».
L’ANC et la constitution du Majestic
Avec la confrontation fratricide qui perdure entre les trois groupes «Alger», «Tlemcen» et «Tizi-Ouzou», Aït Ahmed démissionne du GPRA le 27 juillet 1962, refusant cette lutte de clans. « Je profite d’une escale à Paris pour rendre publique ma démission de tous les organismes directeurs de la révolution. Cette décision est irrévocable. Elle répond au consensus populaire, au désir profond du peuple qui rend responsable tous les dirigeants, sans exception, de la situation actuelle et qui voudrait voir tous s’en aller», déclare à l’époque Aït Ahmed sur la télévision française.
Il a salué, à cette occasion, « l’attitude responsable et intelligente, parce que neutre et arbitrale, des frères dirigeants de la wilaya IV ». Il a appelé par ailleurs, le comité inter-wilayas, constitué le 25 juin 1962 par les wilayas II, III, IV, la Zone autonome d’Alger et la Fédération de France, à « dégager une formule de réconciliation nationale et d’une direction incontestée ». Pour rappel, ce comité, initié par Boudiaf et Krim Belkacem, entre rapidement en conflit avec l’EMG de Houari Boumediene qui a eu la mainmise sur le CNRA et toute l’armée des frontières. Répondant à son intervieweur sur ceux qui devront mener l’arbitrage entre les différents clans, le démissionnaire répond sans ambigüité: « la solution est dans l’arbitrage et la médiation qui se développe à l’heure actuelle. L’arbitrage des militants qui s’articulera probablement sur le conseil inter-wilayas et non pas le CNRA. Je dois dire franchement, le CNRA est un organisme qui me paraît réactionnaire en ce sens qu’il ne reflète pas l’esprit de la révolution, ni la nature de la révolution. Son niveau politique ne lui permet pas de s’adapter et de participer à la reconversion de notre lutte en fonction des tâches d’édification. »
Le 3 août 1962, à Alger, Ben Bella impose son choix de constituer un nouveau bureau politique qui remplacera le GPRA à la tête de l’Etat algérien naissant. Aït Ahmed refuse encore une fois de s’associer à ce coup de force mais Boudiaf y participe cette fois-ci (les deux hommes ont déjà refusé la même proposition du groupe de Tlemcen, le 22 juillet). Le 9 septembre, l’armée des frontières rentre victorieuse à Alger après plusieurs semaines d’exactions et de confrontation militaire avec quelques wilayas (particulièrement la wilaya IV).
Le 20 septembre, l’Assemblée nationale constituante (ANC) a été élue sur liste unique. Autrement dit, beaucoup de cadres du FLN et de l’ALN révolutionnaires sont désignés comme députés d’office de l’ANC, malgré leur opposition à Ben Bella. C’est le cas de Krim, Boudiaf et Aït Ahmed. Ce dernier n’a pas cessé de critiquer la nature du régime que veulent instaurer les benbelistes. Voilà l’une de ses interventions en tant que député de l’ANC : « ce qui importe, c’est de redonner la parole au peuple. Nous nous engageons, de toute façon, à militer pour la permanence des règles de jeu démocratique, pour le respect du pluralisme linguistique et le pluralisme politique. Personnellement, je suis allergique aux adjectifs ; république, démocratique, populaire… formidable ! Moi je me contenterais du mot République. Ce qui est important, c’est le contenu. Nous espérons innover en la matière, faire œuvre pédagogique, et ne pas tomber uniquement dans les représentations symboliques. Il faut essayer de donner un contenu réel, un contenu démocratique ; redonner aux Algériens le droit à l’autodétermination, c’est ça que nous voulons». Le 25 septembre, Ferhat Abbas est élu président de l’ANC et Ben Bella est appelé à former le premier gouvernement de l’Algérie indépendante. Le 29 septembre 1962, Ben Bella forme son gouvernement sur mesure.
A l’occasion de la célébration du premier anniversaire de l’indépendance de l’Algérie, le 5 juillet 1963, Aït Ahmed critique ouvertement le clanisme et le régionalisme de Ben Bella. Il paraît dans un documentaire, produit conjointement par les télévisions algérienne et française, pour lancer un message très clair: « Tout va mal. Pour que ça aille bien, il faut en discuter. Discuter avec qui ? Avec les véritables révolutionnaires… La majorité des députés étaient pour l’ouverture d’un débat. Je les ai vus, j’ai fait un travail de couloir. Tous se plaignent de la situation, de la dégradation qu’il y a dans le pays... Il n y a qu’à faire le contraire de ce qui a été fait à Tlemcen. Tlemcen c’est de la démagogie révolutionnaire. C’est la politique de clans. Ce sont les alliances du hasard et c’est la guerre civile, il faut faire le contraire. Je suis contre la guerre civile, je suis contre la politique de clans. Que Ben Bella fasse un gouvernement d’union nationale avec les véritable révolutionnaires, je le soutiendrai, ou qu’il s’en aille». Faisant la sourde oreille, son successeur à la tête de l’OS refuse la moindre ouverture d’esprit et refuse de partager le pouvoir avec les «vrais révolutionnaires». Ainsi, en dehors de l’ANC, il se fait préparer un avant-projet de constitution qui sera approuvé par référendum national le 8 septembre 1963 et promulgué deux jours après.
Selon plusieurs témoignages comme celui d’Ali Haroun, député de l’ANC, les cadres du FLN pro-Ben Bella, c'est-à-dire le BP, se réunissent trois jours avant la plénière (celle du 28 août 1963 où le texte de la nouvelle constitution sera adoptée) dans un grand cinéma d’Alger, le Majestic (actuellement l’Atlas), et adoptent un texte d’avant-projet pour la constitution sans que la sous-commission de la rédaction de ce texte, désignée par l’assemblée constituante, ne soit au courant. De son côté, Aït Ahmed explique à qui voulait l’entendre que «la constitution a été faite dans un cinéma par des gens triés sur le volet. Et puis, comme à chaque fois, ils essayent de respecter les normes en l’imposant à l’Assemblée constituante. C’est là où le sens de l’honneur chez certains, comme Ferhat Abbas, les a poussé à démissionner». L’ascension autoritaire de Ben Bella ne s’arrête pas à ce niveau. Le 15 septembre 1963, il s’impose comme le premier président élu de l’Algérie indépendante et s’offre les pleins pouvoirs, bien sûr sous l’œil, à la fois protecteur et méfiant, de son allié Boumediene, nommé à juste titre ministre de la Défense et vice-président.
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