mardi 26 septembre 2017

Air France ouvre sa ligne reliant Montpellier à Alger

L’aéroport de Montpellier est désormais connecté à Alger en 1h30 ! Il s’agit de la seule ville de province jouissant d’une ligne directe avec la capitale Algérienne.


La nouvelle destination d’Air France en vente depuis le 11 juin opèrera ses vols à partir du 30 octobre 2017. Une opération surprenante que d’ouvrir une nouvelle ligne à l’approche de l’hiver ? Pas pour le Directeur Général d’Air France KLM Zoran Jelkic qui prévoit un taux de remplissage de 65% pendant la saison hivernale. Ensuite l’objectif sera d’acquérir 10 000 places supplémentaires pendant l’été 2018.
Pour le président du directoire de Montpellier Méditerranée Aéroport Emmanuel Brehmer« Air France KLM représente 60 % de l’activité aérienne ». Le choix d’ouvrir la ligne depuis Montpellier et non pas depuis Marseille est stratégique car en réalité la communauté Algérienne y est proportionnellement plus importante. Lors de la conférence de presse pour le lancement de la ligne le 19 septembre, Emmanuel Brehmer lance aux journalistes « nous avons besoin de vous » pour la réussite de la ligne !

Crédit : Aéroport Monptellier Méditerrannée. De g à d : Jean Jacques LABADIE, Directeur Régional Délégation Occitanie, Air France-KLM ; Zoran JELKIC, Directeur Général France, Air France-KLM ; Emmanuel BREHMER, Président du Directoire, Aéroport Montpellier Méditerranée.
Crédit : Aéroport Monptellier Méditerrannée.
Alger compte 2.5 Millions d’habitants et représente le premier pôle économique et commercial de l’Algérie. Ainsi que ce soit un voyage loisir ou affaire, Air France propose 2 lignes par semaines avec 3 formules de prix. Le prix d’appel est de 44 Euros pour un vol Aller-Retour !

Par Juli Choquet
source : ecomnewsmed.com

mardi 19 septembre 2017

Air France ouvre une ligne Montpellier-Alger

Pierre Vieu (AMM), Zoran Jelkic (Air France KLM), Emmanuel Brehmer (AMM)
Pierre Vieu (AMM), Zoran Jelkic (Air France KLM), Emmanuel Brehmer (AMM) (Crédits : PC)

Par Pauline Compan 
Dès le 30 octobre, la compagnie Air France-KLM desservira Alger, depuis l'aéroport de Montpellier Méditerranée. Deux vols allers et deux vols retours assureront la liaison chaque semaine. Montpellier est le premier aéroport en région, directement relié à l'Algérie.
Développer les destinations depuis les régions est une stratégie revendiquée chez Air France-KLM. À Montpellier, le groupe fait le pari de l'Algérie et assure avoir des commerciaux très confiants sur cette nouvelle destination.
" Nos études ont montré une communauté algérienne montpelliéraine deux fois moins importante qu'à Marseille, mais sans alternative de voyage en dehors du trajet vers l'aéroport marseillais, explique Zoran Jelkic le directeur général France. Il y avait une place à prendre."
Air France-KLM va proposer 15 000 sièges sur la saison hivernale et vise un taux de remplissage de 65 %. Des promotions sont en place jusqu'à fin septembre avec des billets à partir de 41€. Les tarifs structurels commenceront ensuite à 61 €, avec trois catégories : "light", "standard" et "flexible", qui correspondent à la nouvelle politique tarifaire sur les moyens courriers européens.
60 % de l'activité de l'aéroport Montpellier Méditerranée provient d'Air France. Depuis novembre 2016, sa navette Hop relie Montpellier à Orly dix fois par jour.
 
source : http://objectif-languedoc-roussillon.latribune.fr/economie/infrastructures/2017-09-19/air-france-ouvre-une-ligne-montpellier-alger-750870.html

Air France : un vol Montpellier-Alger dès le 30 octobre 2017

Air France KLM ouvre une ligne régulière Montpellier-Alger avec deux vols allers et retours hebdomadaires
TRANSPORTS. Mardi matin, à l’aéroport Montpellier Méditerranée, Air France a présenté la ligne Montpellier-Alger qui accueillera ses premiers passagers dès le 30 octobre prochain. Desservie plus précisément par la compagnie Air France-KLM, cette nouvelle ligne prévoit deux vols aller etdeux vols retour hebdomadaires : « Il s’agit d’un vrai défi », a expliqué Zoran Jelkic, le directeur général Air France qui a fait le déplacement dans l’Hérault : « L’un des axes de notre stratégie de groupe vise à développer les destinations internationales depuis les grands aéroports régionaux. Et Montpellier fait parti de ces grands aéroports ».
Paris et Montpellier, seules villes reliées directement
Une reconnaissance qui a déjà valu à la plateforme montpelliéraine de décrocher la fameuse « navette » d’Air France avec, désormais, une dizaine de vols cadencés chaque jour sur Orly. « Avec l’ouverture de la ligne Montpellier-Alger, Montpellier devient après Paris la seule ville française directement reliée à l’Algérie », rappelle Emmanuel Brehmer, président du directoire de l’aéroport de Montpellier.
Le vol vers Alger à 41 €
Pour le lancement de cette nouvelle ligne Air France, des promotions sont proposées jusqu’à fin septembre : des billets sont encore disponibles à partir de 41€, avant de retrouver cet hiver un niveau normal avec un premier prix annoncé à 61 €. La gamme sera ensuite déclinée selon la politique tarifaire d’Air France appliquée actuellement sur les vols moyens courriers (billets Light, Standard et Flexible)
Les horaires :>> Au départ de Montpellier
-Lundi : départ Montpellier 11h05, arrivée Alger 12h40
-Samedi : départ Montpellier 10h45, arrivée Alger 12h20
>> Au départ d’Alger-Lundi : départ Alger 13h55, arrivée Montpellier 15h30
-Samedi : départ Alger 13h50, arrivée Montpellier 15h25
Par Gil Martin
source : https://e-metropolitain.fr/2017/09/19/air-france-un-vol-montpellier-alger-des-le-30-octobre/

jeudi 14 septembre 2017

Littérature. L’Algérie s’invite dans la rentrée littéraire française

Sur les 581 livres parus dans le cadre de la rentrée littéraire française 2017, une petite dizaine d’ouvrages ont pour thème l’Algérie, en particulier les non-dits de la guerre, relève le site Tout sur l’Algérie qui propose un tour d’horizon d’une sélection de ces titres.



Hors de toute commémoration, et alors que les derniers témoins de la guerre d’Algérie sont en train de disparaître, plusieurs auteurs publiés durant la rentrée littéraire française – qui bat actuellement son plein – reviennent par le biais de la fiction sur ce chapitre historique toujours aussi clivant et électrique. À travers les récits de pieds-noirs, de harkis ou d’appelés, ces romans offrent une vision décalée ou plus nuancée des “événements”.
Au-delà de la guerre, d’autres ouvrages s’attachent à raconter l’Algérie et offrent par le prisme de leurs héros respectifs une réflexion sur le pays. Qu’ils puissent éclairer, à défaut d’apaiser. Tour d’horizon.

Nos Richesses, Kaouther Adimi

Déjà remarquée pour son premier livre L’Envers des autres (Actes Sud, 2011), Kaouther Adimi publie Nos richesses, son troisième roman, aux éditions du Seuil.
En 1936, un certain Edmond Charlot, 20 ans, ouvre, dans le quartier des facultés, une librairie-maison d’édition baptisée Les Vraies Richesses à Alger, avec l’ambition de promouvoir de jeunes écrivains de la Méditerranée, quelle que soit leur langue ou leur religion. Il publie notamment le premier texte d’un de ses amis de lycée, encore inconnu, un certain Albert Camus. Au fil des années, Charlot devient une figure majeure de l’édition française. Mais en 2017, dans une Algérie qui n’a plus grand-chose à voir avec celle de la France coloniale, l’auteure imagine que cette librairie doit fermer pour laisser place à une boutique de beignets. Si ici la petite histoire permet de mettre en perspective la grande, elle alerte aussi sur un problème en Algérie : l’absence de politique du livre et le peu de librairies existantes dans le pays.
Nos Richesses, également publié aux éditions Barzakh (Algérie), fait partie des ouvrages retenus pour la première sélection des prix Goncourt et Renaudot 2017.

Indocile, Yves Bichet

À la sortie de l’adolescence, le jeune Théo, 18 ans tout juste, veille Antoine, son ami blessé revenu de la guerre d’Algérie, dans un hôpital militaire. À son tour il est appelé, mais refuse de participer à ce conflit. Le jeune homme n’a pas envie de prendre part à cette histoire. Il a d’autres impératifs, celui de satisfaire sa liberté et ses premières amours. Le voilà déserteur. Il part en cavale, notamment en Suisse, puis finira par se rendre aux autorités militaires. Quelques années plus tard, après l’indépendance, Théo se retrouve en Algérie. À l’endroit où son ami Antoine a été blessé.
Yves Bichet, ancien salarié agricole et peintre en bâtiment, publie aux éditions Mercure de France son onzième roman.

Zabor ou les psaumes, Kamel Daoud

Après le très remarqué Meursaut, contre-enquête (auréolé du Goncourt du premier roman en 2015), le romancier-journaliste algérien revient avec Zabor ou Les psaumes (Actes Sud) ; l’histoire d’un jeune garçon orphelin de mère, rejeté par les siens dans un village perdu, qui pour résister et s’échapper de son milieu, se réfugie dans la littérature et l’écriture.
À travers cette fable, Kamel Daoud se raconte, et nous rappelle que, dans un monde paralysé par l’obscurantisme, l’ignorance ou plus généralement la bêtise humaine, ce sont la littérature et l’écriture qui nous sauvent.

Dans l’épaisseur de la chair, Jean-Marie Blas de Roblès

Ce roman [publié aux éditions Zulma] est l’histoire de Manuel Cortès, fils d’immigrés espagnols installés dans la ville de garnison de Sidi Bel Abbès en 1882, devenu chirurgien, puis engagé volontairement aux côtés des Alliés en 1942. À travers l’histoire de cet homme racontée par son fils, c’est tout un pan de l’histoire coloniale – de l’arrivée des premiers colons espagnols en 1880 en Algérie au rapatriement en 1962 – qui est présentée.
Le roman, qui s’inspire très largement de la vie du père de Jean-Marie Blas de Roblès, interroge aussi la notion d’identité pied-noir, et déverrouille cette mémoire encore interdite. L’auteur rappelle au passage que ces Européens installés en Algérie sont devenus les boucs émissaires de l’histoire.

Un loup pour l’homme, Brigitte Giraud

Publié aux éditions Flammarion, ce roman raconte la guerre d’Algérie à hauteur d’un“appelé”. Au printemps 1960, Antoine, jeune auvergnat de 23 ans, est contraint de laisser sa jeune épouse enceinte et se retrouve parachuté dans ce conflit. Ne souhaitant pas tenir une arme, il devient infirmier à l’hôpital militaire de Sidi Bel Abbès, en Algérie.
Cette guerre, c’est à travers les soldats blessés qu’il la raconte. Et s’il n’est pas sur le front mais “en coulisses”, c’est aussi par le récit de ces jeunes hommes blessés qu’il la subit. Mais pour ces vies gâchées au combat, il n’y aura aucune reconnaissance. À leur retour, ces soldats sont condamnés au silence : après le référendum de 1962, la guerre d’Algérie est un chapitre de l’histoire dont il faut désormais taire le nom.

Des cœurs lents, Tassadit Imache

“Nous, à l’origine, on vient de cette smala improbable qui courait pieds nus sur le lino du living le dimanche avec sarbacanes et lance-pierres, bouclés toute la journée à l’intérieur, à attendre le massacre de Fort Alamo. Des visages blêmes en lutte féroce contre le vide et la désolation. Une tribu victorieuse à un moment.”
À la mort de leur petit frère Tahir, François et Bianca se retrouvent réunis après des années de séparation. Bien que les personnages n’aient plus grand-chose en commun, leur passé douloureux – la guerre d’Algérie et l’absence de leur mère – refait surface.
Publié aux éditions Agone, Des cœurs lents est le cinquième roman de l’auteure algérienne.

Climat de France, Marie Richeux

“Climat de France”, inutile de la présenter. C’est le nom de la cité qui domine le quartier de Bab El-Oued, construite par l’architecte français Fernand Pouillon entre 1954 et 1957. Mais pour Marie, ce type d’ensembles urbains n’est pas inconnu. L’architecte a construit le même type d’immeubles chez elle, à Meudon-la-Forêt. Là où elle a grandi. Désireuse de comprendre ce qui unit les deux lieux, elle se plonge dans la vie de ceux qui habitèrent et habitent ces lieux, en France et en Algérie. À sa façon, l’auteure s’empare de la question franco-algérienne. Animatrice et productrice chez France Culture, Marie Richeux signe son premier roman chez Sabine Wespieser.

L’Enfant de l’œuf, Amin Zaoui

“Harys, le narrateur, est un bon chien, un caniche qui aime son maître, qui aime ses chaussettes puantes, son haleine parfumée au vin rouge, sa voix quand il chante Bécaud. Ils habitent tous deux à Alger et son maître a pour maîtresse une chrétienne réfugiée de Damas, au corps vibrant de désir et à l’âme bouleversée par la guerre.”
Avec cet ouvrage, l’écrivain et professeur de littérature signe son neuvième roman, qui dresse le portrait d’une Algérie rongée par l’islamisme radical. Paru le 7 septembre aux éditions Le serpent à plumes.

L’Art de perdre, Alice Zeniter

L’auteure, jeune française d’origine algérienne, qui publie son cinquième roman chez Flammarion nous emporte dans la quête de ses origines en racontant la guerre d’Algérie du côté “des perdants”. Dans les années 1950, son grand-père, un paysan kabyle, préfère se ranger du côté de l’armée française. Pour ce personnage peu érudit, il ne s’agit pas d’un choix mais plus d’une adaptation aux circonstances… Quand lui et sa famille sont contraints de fuir l’Algérie en 1962 pour éviter les représailles du FLN, ils sont devenus des parias. À leur arrivée en France, ceux que l’on considère comme des “collaborateurs” de l’autre côté de la Méditerranée sont parqués dans des camps de transit dans le sud de la France.
De leur pays qui ne veut plus d’eux, ils ne transmettront rien comme héritage à leur descendance. À travers cette épopée familiale, Alice Zeniter, petite-fille de harkis, raconte la culpabilité des siens, prisonniers d’un passé qu’ils préfèrent oublier.
Sarah Belhadi
source : www.tsa-algerie.com

mardi 12 septembre 2017

Le cochon, aux origines du tabou Par Laetitia Dechanet

Le cochon, aux origines du tabou

 12 septembre 2017


Le cochon, aux origines du tabou

Elevé et consommé au Proche-Orient pendant l’Antiquité, le cochon est devenu le plus intouchable des animaux. Si l’argument hygiéniste a longtemps prévalu pour justifier son interdiction dans le judaïsme et l’islam, de nombreux experts estiment que les véritables raisons sont ailleurs.

“Une autre chose”. C’est ainsi que le Talmud désigne le porc, proscrit par la Torah (Lévitique, 11, 7 et Deutéronome, 14, 8). Bien qu’il fasse partie d’une longue liste d’interdits alimentaires, les juifs semblent le considérer comme le plus impur des animaux impurs puisqu’il ne mérite même pas qu’on prononce son nom. Le même traitement de défaveur lui est réservé dans l’islam, où sa chair est la seule à être nommément désignée comme impropre à la consommation dans plusieurs sourates du Coran. “Il vous est interdit de consommer la bête morte, le sang, la viande de porc, celle d’un animal sacrifié à d’autres divinités qu’à Allah, la bête étranglée, assommée, morte d’une chute ou d’un coup de corne”, pose par exemple la sourate 5, verset 3.
Jerôme Bosh, Le jardin des délices (détail), huile sur panneau, vers 1500.
Pourtant, dans la région qui a vu naître le judaïsme puis se développer l’islam, le cochon était depuis longtemps consommé et apprécié. Les sources historiques montrent que l’élevage porcin était couramment pratiqué dans tout le Proche-Orient ancien (Mésopotamie, Levant, Anatolie, Iran). Sa présence est ainsi attestée à partir du 7e millénaire avant J.-C. par les ossements retrouvés sur de nombreux sites archéologiques de la région, mais aussi dans les textes (lexiques, livres de comptabilité, contrats, procès...) qui le mentionnent dès les débuts de l’écriture, vers la fin du 4e millénaire. Le porc est aussi représenté par les artistes, le plus souvent sous sa forme sauvage (sanglier) dans des scènes de chasse, par exemple pour orner des sceaux cylindriques (rouleaux servant à imprimer des frises sur des tablettes d’argile). Le cochon donne également sa forme à des amulettes ou à des vases rituels.

Judensau, gravure, 1470.
Outre l’économie, les arts et la religion (certaines sources évoquent l’usage de graisse de porc lors des cérémonies religieuses et des offrandes de porcelets pour le culte funéraire), l’animal trouve sa place dans la pharmacopée de l’époque. A titre d’exemple, des textes médicaux du 1er millénaire avant J-C. prescrivent, en cas d’accouchement difficile, l’ingestion de viande de porc, à laquelle on prête certainement des vertus fécondes (une truie peut produire entre 200 à 300 porcelets en une douzaine d’années). De même, les estomacs paresseux sont invités à consommer des soies de cochon et les maladies respiratoires se soignent avec du bouillon de viande de porc. Dès lors, comment le tabou est-il né?
Procès de la truie de Falaise, gravure, copie d’une peinture du 15e siècle, vers 1850. Dans l’Europe du Moyen-Âge, les animaux étaient regardés comme des êtres moraux et perfectibles, et même responsables de leurs actes. D’où les procès qui leur furent intentés à partir du 13e siècle.
Pour le médecin et philosophe juif Maïmonide, dont la pensée faisait autorité dans l’Andalousie du 12e siècle, la raison d’une telle interdiction ne fait aucun doute: les mœurs du cochon, qui se vautre dans la fange et se nourrit d’ordures, quand il ne s’agit pas de ses propres excréments, font de lui l’animal impur par excellence. L’exégète s’inscrit dans la logique de l’Ancien Testament, qui évoque plusieurs fois ce fâcheux penchant pour les immondices.A cela, la médecine moderne ajoutera, quelques siècles plus tard, que la viande de porc se conserve mal dans les pays chauds et que, plus que tout autre, elle véhicule parasites et maladies comme le ténia, la listériose ou la trichinose. Les Hébreux, suivis des siècles plus tard par les musulmans, s’en seraient donc rendu compte bien avant que cela ne soit médicalement formulé.
Si l’argument de l’hygiène paraît communément admis, beaucoup le remettent aujourd’hui en cause, comme l’anthropologue Mohamed Hocine Benkheira, spécialiste du droit musulman et auteur de Islam et interdits alimentaires : “Seuls des esprits naïfs défendent encore maintenant la thèse hygiéniste du porc comme vecteur de maladies”.
Dire que la viande de porc se conserve mal est “plutôt une croyance populaire, sans valeur religieuse ou scientifique convaincante”, affirme pour sa part le docteur vétérinaire français Yahya Deffous, qui souligne que “des procédés de conservation très performants, comme la salaison et le séchage, existaient déjà dans l’Antiquité”. S’il admet que le porc est bien porteur de bactéries et parasites, au même titre que d’autres viandes (bœuf) ou produits de la mer, la question de l’hygiène reste pour lui ”une réponse trop simpliste pour mériter un interdit divin”. Il en veut pour preuve le fait que les hommes vivant sous des latitudes identiques ou comparables à celles que peuplaient les premiers juifs et musulmans consomment du porc depuis l’Antiquité, sans être plus malades pour autant.

Marquer sa différence

D’après l’historien français Michel Pastoureau, spécialiste des animaux, des couleurs, des images et des symboles, “toute société a besoin de faire porter sur certains animaux des interdits de différentes natures, notamment alimentaires”. La question étant de savoir pourquoi. L’une des hypothèses réside dans le conflit entre sédentaires et nomades. A l’époque antique, les groupes de pasteurs méprisent le mode de vie réglé et besogneux des fermiers sédentaires, auxquels ils reprochent leur manque de spiritualité et d’ardeur au combat. Cette haine se serait cristallisée sur le porc, symbole du mode de vie sédentaire puisqu’il est incapable de suivre les nomades dans leurs déplacements. Or les premiers Hébreux sont justement des tribus nomades. Seul bémol, le tabou a perduré dans le temps alors que le clivage nomades- sédentaires a disparu.

Un animal à part

Les anthropologues s’accordent néanmoins sur le fait que l’interdit alimentaire dans un groupe humain relève de la nécessité de se distinguer des autres. De même, une religion nouvelle a besoin de marquer sa différence. Pour certains, à l’instar de l’éminent sémitisant français Adolphe Lods, le porc a été interdit par les Hébreux parce qu’il était considéré comme sacré dans des religions concurrentes, c’est- à-dire investi d’influences divines ou démoniaques, notamment chez les Cananéens qui vivaient en Palestine avant les juifs.
Le haro sur le cochon peut aussi s’expliquer par le fait que c’est un animal hors-catégorie. Les Hébreux classaient les animaux selon leur morphologie, leur façon de se déplacer et leur milieu (terre, air, mer).
Selon le principe que chaque chose doit être à sa place, les animaux impurs seraient donc ceux qui échappent à ce schéma, comme l’a mis en évidence l’anthropologue britannique Mary Douglas. Il en va ainsi du porc, qui ne rumine pas contrairement aux autres animaux aux sabots fendus comme lui. Animal à part, le cochon l’est aussi par rapport au reste du bétail. Lui qui ne fournit ni lait, ni laine ou fourrure, ni cuir, s’avère en outre incapable d’assurer les corvées de trait pour le labour ou de transport de marchandises.
Décollation du juif idolâtre, Bible latine du 13e siècle.
L’élevage du porc pour sa seule viande relève donc du luxe pour le paysan de l’Antiquité, d’autant que cet animal vorace ampute une partie de la nourriture de l’homme, sans compter qu’il nécessite beaucoup d’eau, une denrée rare au Proche-Orient. En bref, il coûte davantage qu’il ne rapporte. Pour l’anthropologue nord-américain Marvin Harris, qui développe cette thèse utilitariste, “les civilisations ont tendance à imposer des sanctions religieuses pour la consommation de viande lorsque le rapport entre les bénéfices communautaires et les coûts inhérents à l’usage d’une espèce particulière se détériore”. Concernant plus particulièrement le porc, il précise : “Les restrictions les plus sévères apparaissent habituellement lorsqu’une espèce précieuse sur le plan nutritionnel ne devient pas seulement plus coûteuse, mais risque de bouleverser l’écosystème. Le cochon appartient à cette catégorie-là”.

Ce proche cousin de l’homme

Pour Michel Pastoureau, l’interdit qui frappe le porc s’explique surtout par son étroit cousinage avec l’homme. Si les analyses ADN permettent aujourd’hui d’établir avec certitude ce lien de parenté, les Anciens ne l’ignoraient pas pour autant. “Cette proximité biologique était déjà bien connue des médecines grecques et arabes. Une idée récurrente chez beaucoup d’auteurs antiques et médiévaux souligne combien l’organisation anatomique interne de l’homme et celle du cochon sont identiques, ou presque”, assure Pastoureau, qui fait remarquer au passage que porcus (porc en latin) est l’anagramme de corpus (corps).
Al-Hariri, Les séances (al-Maqamat), 1334. L’émir Abou Sayd enseignant à son fils les interdits qui pèsent sur la viande de porc.
Dans l’Europe du Moyen-Age, les écoles de médecine enseignaient l’anatomie humaine en disséquant des cochons. De nos jours encore, beaucoup d’expériences sont menées sur des cochons pour comprendre l’être humain (le singe est certes un peu plus proche génétiquement, mais c’est une espèce protégée). Et dans l’industrie pharmaceutique, l’animal le plus utilisé est le porc dont les organes, certaines glandes et le sang entrent dans la composition de nombreux médicaments. Similitude ultime, la viande de porc aurait le même goût que la chair humaine selon certains témoignages, comme ceux des “rescapés des Andes”, ces victimes d’un crash aérien en 1972 contraintes de manger leurs congénères pour survivre. “Si en plus sa viande présente la même saveur que la chair humaine, point n’est besoin d’aller chercher ailleurs les raisons des interdits qui l’entourent”, écrit Michel Pastoureau, qui en conclut : “Manger du porc c’est, plus ou moins, être cannibale”.

Par Laetitia Dechanet 


Cet article a initialement été publié par notre partenaire Dîn Wa Dunia, dans le numéro 3 du mois de février 2016.

mercredi 30 août 2017

DÉCRYPTAGE Avion ou bateau : la diaspora algérienne dénonce un « racket » pour rentrer l’été au pays


DÉCRYPTAGE
Avion ou bateau : la diaspora algérienne dénonce un « racket » pour rentrer l’été au pays
A l’approche de l’Aïd ou des grandes vacances, le prix des billets vers l’Algérie flambe, en partie à cause d’une trop faible concurrence.


La baie d’Alger, en juillet 2007.
La baie d’Alger, en juillet 2007. CRÉDITS : ZOHRA BENSEMRA / REUTERS


« J’aurais préféré passer l’Aïd avec ma mère, mais les prix sont inabordables en ce moment », déplore Farida, Algérienne installée à Marseille depuis 2001. Pour éviter de payer trop cher son voyage, cette mère de deux enfants a dû se résoudre à partir dans son pays d’origine pendant la saison hivernale.
Il y a quatre ans, Farida, mère au foyer, et son mari, maçon, avaient dû dépenser 2 500 euros pour la traversée Marseille-Alger. Une somme importante qui a convaincu le couple de changerla date de leur départ et leur moyen de transports« Nous avons pris l’avion cet hiver. Cela nous a coûté 800 euros pour mon mari, mes deux enfants et moi. Sur place, on a loué une voiturepour 30 euros par jour. Cela reste plus abordable que le bateau », observe Farida. Selon le comparateur en ligne Direct Ferries, le prix moyen d’ une traversée Marseille-Alger pour une voiture et un passager, s’élève en moyenne à 1913 euros en juin. C’est trois fois plus cher que le trajet Marseille-Tunis qui, dans les mêmes conditions et à la même période, coûte en moyenne 591 euros.
« Obligation familiale »
Avec l’augmentation du coût de la vie, Farida a de plus en plus de difficultés à économiser pour se rendre en Algérie« Outre les billets de transport, nous devons apporter des cadeaux pour toute la famille et payer la nourriture », explique-t-elle, qui avoue dépenser 2 000 euros sur place rien qu’en frais de bouche. Elle qui partait tous les ans voir ses parents a considérablement restreint ses déplacements.
Lille, Aissa fait le même constat. Cet enseignant de 50 ans explique ironiquement qu’il préfère partir en pension complète en Turquie pour le même prix. « Je me rends de moins en moins en Algérie. J’en ai assez de limiter les sorties et les loisirs de mes filles pour nous payer simplement des billets d’avion ou de bateau », s’insurge l’enseignant. En matière de transports, Aissa a tout expérimenté : les traversées Marseille-Alger, Barcelone-Alger et Gênes-Tunis (le plus avantageux mais aussi le plus long) et l’avion. Pendant l’été, un aller retour Lille-Alger coûte en moyenne 430 euros, c’est le même prix qu’Aissa aurait débourser s’il s’était rendu à Agadir durant les grandes vacances. Du « racket » pour l’ enseignant qui souligne que pour aller en Tunisie, l’avion parcourt 2 478 km contre 1 544 km seulement pour rejoindre l’Algérie.
 « La diaspora algérienne ne se rend pas au pays pour faire du tourisme mais par obligation familiale », renchérit ce Français, originaire de Sétif. A 200 km de chez Aissa, Najat, 48 ans, habitant Argenteuil et originaire d’Oran, avoue également partir par devoir en Algérie. « Pour nous, ce n’est pas un luxe. Nous devons aller voir nos parents. C’est dans notre culture », explique cette veuve, mère de trois enfants. Avec son Smic, Najat économise « un peu tous les mois » pour s’y rendre trois semaines en période estivale.
« Ouvrir les espaces aériens et maritimes »
Face aux mécontentements de la diaspora, plusieurs associations installées en France ont interpellé les autorités algériennes sur la cherté des prix des transports. Otman Douidi, vice-président de l’association Diaspora des Algériens résidant à l’étranger (Dare) a notamment exhorté le chef de l’Etat Abdelaziz Bouteflika à respecter sa proposition 5 présentée lors de sa dernière campagne électorale. Celle-ci prévoyait de baisser le prix des billets d’avion Air Algérie, jugé excessif à l’approche des grandes vacances scolaires. « J’ai apporté mon soutien au président, car je pensais qu’il allait arranger la situation. Mais aujourd’hui, rien n’a été fait », estime Otman Douidi.
Comme lui, Salah Hadjab, responsable du Collectif contre la cherté des transports vers l’Algérie (CCTA), se bat pour que les tarifs soient revus à la baisse : « Il faut ouvrir les espaces aériens et maritimes à la concurrence et au low-cost international, et arrêter le duopole exercé par Aigle Azur et Air Algérie, et le quasi-monopole d’Algérie Ferries. »
En effet, cette compagnie maritime algérienne dessert cinq villes – Annaba, Oran, Alger, Skikdaet Béjaïa – alors que sa seule concurrente Corsica Linea ne dessert qu’Alger. Quant aux compagnies à bas coût, elles sont encore peu nombreuses dans l’espace aérien. Le comparateur de vols Skyscanner fait état de quatre compagnies pas chères assurant les liaisons France-Algérie, auxquelles il faut ajouter la petite dernière Atlas Atlantique Airlines. C’est deux fois moins que pour le Maroc.

« Une honte » pour Aissa qui déplore cette situation et s’inquiète pour les générations futures. « Ce n’est pas qu’une question d’argent. Si rien ne bouge, la diaspora ne reviendra plus en Algérie. Peu à peu, nos enfants perdront le lien avec le pays de leurs parents. Ils seront amputés d’une part de leur identité. »


source : Par Stéphanie Plasse (contributrice Le Monde Afrique)
LE MONDE Le 26.06.2017 http://www.lemonde.fr/afrique/