L’exposition « Maqamate Rachid Koraïchi » a débuté ce jeudi à la villa algéroise de Dar Abdellatif. Ce lieu chargé d’histoire met en valeur l’œuvre du célèbre artiste algérien. Rachid Koraïchi réussit à donner sens à la tradition sous une approche contemporaine et novatrice.
« Maqamate » le titre de cette exposition, organisée par l’Agence algérienne pour le rayonnement culturel, en dit long sur les influences de l’artiste. Les significations de ce terme arabe sont nombreuses, mais renvoient dans le contexte des œuvres de Rachid Koraïchi à l’univers du soufisme. Maqamate désigne ainsi les différents paliers de l’élévation spirituelle vers la vérité divine, à travers la foi et la connaissance. Le soufisme est une inspiration récurrente dans le travail de Rachid Koraïchi, qui a notamment participé à sa renommée internationale.
Un artiste algérien à la renommée internationale
Rachid Koraïchi est considéré comme l’un des plus grands artistes plasticiens de son époque. Il est en tout cas, indéniablement, l’un des plus célèbres à l’étranger, en témoigne des expositions au British Museum de Londres ou au MoMa de New York. C’est d’ailleurs accompagné d’une armada de personnalités de la sphère artistique internationale, qu’il est venu présenter son travail à Alger. Directeurs de galeries ou de musées, historiens ou artistes venus d’Europe, des Etats-Unis, du Maroc ou de Tunisie, tous l’ont suivi ou aidé dans son travail. Ils sont surtout présents pour animer des conférences les 17 et 18 mai à Dar Abdellatif.
Cet homme, né en 1947 dans la ville d’Aïn Beïda à 500 km à l’est d’Alger, vit aujourd’hui à cheval entre la France et la Tunisie. Il se rend aussi régulièrement en Algérie, au Maroc ou dans d’autres lieux où il peut se mettre à créer. C’est justement au Caire que la réflexion autour des œuvres qui sont exposées à Alger du 16 mai au 13 juin est née.
«Je suis un artiste contemporain qui s’inscrit dans la civilisation islamique»
L’artiste explique que l’installation « Maqamate est presque l’enfant naturel d’un premier projet qui a été montré à Munich en 2010 et qui avait mis trois années à se réaliser au Caire ». Rachid Koraïchi avait la volonté de présenter un « islam apaisé » et s’était mis à travailler sur les « mystiques de l’islam ». Maqamate s’inscrit donc dans cette continuité puisque les 80 lithographies exposées sont dédiées à dix grands maîtres du mysticisme musulman, dont Sidi Boumediène Chouaieb, Jallal Eddine El Rûmi, Rabia El Adawiyya, Ibn El Arabi. Chaque série comporte huit œuvres d’une même couleur composées de dessins, d’écrits en arabe et de signes. La dernière lithographie de la série représente toujours une main ouverte, qui est un « symbole de paix », selon Rachid Koraïchi. Tout autour sont calligraphiés les 99 noms d’Allah, une façon de rendre hommage à ces « saints » qui ont « dédiés leur vie à Dieu », explique l’artiste plasticien.
Son travail s’inspire indéniablement de l’islam et de l’imaginaire religieux. Pourtant, avant de dévoiler les œuvres de son exposition, il a tenu à préciser : « je ne suis pas l’artiste de l’islam ». « Je suis un artiste contemporain qui s’inscrit dans la civilisation islamique ». Il ne nie donc pas tout l’héritage de l’art et de la mystique musulman qu’il possède. Au contraire, il l’utilise sans cesse dans ses œuvres, mais d’une manière contemporaine : il réinterprète et surtout il crée quelque chose de nouveau à partir de l’héritage culturel religieux. Par ailleurs, l’islam n’est pas sa seule source d’inspiration. Il aime à puiser dans les traditions en général. Algériennes, notamment. On perçoit dans ses lithographies des dessins ou des signes d’inspiration berbère et Touareg. Dans une vidéo projetée au cours de l’exposition, on le voit d’ailleurs en plein apprentissage avec des Touaregs.
La seconde partie de l’exposition Maqamate se compose d’une série de sept imposantes sculptures intitulée « Prière pour l’absente ». Représentant des formes humaines à l’aide de calligraphies, elles sont installées dans la cour verdoyante de la villa Dar Abdellatif. Ces œuvres acquièrent une nouvelle dimension lorsque la lumière du soleil commence à décliner et que les ombres grises des sculptures s’affirment sur les murs blancs.
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