dimanche 2 juin 2013

Un pillage organisé Par Mustapha Hammouche

Un pillage organisé

Par : Mustapha Hammouche
Enfin un classement où l’Algérie “brille” ! Selon un rapport élaboré par la très officielle Banque africaine de développement et la très sérieuse organisation non gouvernementale Global Financial Integrity, notre pays occuperait une place de choix sur le podium des pays africains les plus “performants” en termes de transferts illicites de capitaux hors continent. Avec, “à son actif”, une évasion de 173,11 milliards de dollars en trente ans (1980-2009).
Un précédent rapport (2010) de la même ONG faisait état de transferts de 25,7 milliards pour la période 1970-2008. Ce qui indique que même en ne tenant plus compte de la décennie 1970, la GFI, en actualisant ses chiffres, a dû les multiplier par sept !
En gros, l’Algérie aurait subi des fuites illégales de capitaux de l’ordre de 5,5 milliards par an. Sans connaître dans les détails la dispersion de cette hémorragie dans le temps, l’on peut aisément concevoir qu’ils ont évolué en fonction des recettes annuelles et de la progression du niveau d’investissement et du budget de soutien à la relance. Autrement dit, c’est l’échelle de recettes et dépenses de la décennie passée qui pouvait, à ce point, gonfler la moyenne des transferts illicites. Les informations qui, ces derniers temps, font l’actualité, confirment cette accélération du mouvement de pillage des ressources.
173 milliards de dollars, ce n’est peut-être que la partie de l’iceberg que la BAD et la GFI ont pu observer, mais c’est déjà presque l’équivalent des réserves de changes du pays.
C’est un peu comme si ces passeurs de ressources se partageaient la richesse du pays et s’en allaient déposer leur butin sous d’autres cieux. Pour qu’un tel niveau de trafic puisse s’accomplir, il fallait que le détournement fût une activité constitutive du fonctionnement institutionnel du pays. Il fallait aussi que cette activité connaisse une forte intensité et soit soutenue par une grande permissivité politique.
Les scandales, qui parfois éclaboussent certains barons de la décision économique, sans conséquence d’ailleurs, rendent à peine comptent de l’étendue réelle des dégâts, et dont on ne prend la mesure qu’à l’occasion de telles communications. Et même quand ces affaires sont portées à la connaissance du public par les fuites claniques, par la communication d’institutions étrangères, elles finissent dans un enlisement judiciaire. Cela fait dix ans que l’affaire Khalifa a éclaté ; elle ne semble pas près de connaître son épilogue. Quant à l’affaire Sonatrach 2, elle commence déjà à s’éterniser dans ses dédales procéduraux. Bientôt, la distance générationnelle qui séparera les faits de leur traitement juridique, les reléguera au rang de séquelles parmi d’autres d’un régime tout entier voué à la prédation.
Quand un pouvoir peut aller jusqu’à effacer les traces de ses procédés prévaricateurs, comme il l’a fait avec la dissolution de BRC, c’est qu’il n’est résolument pas disposé à se laisser demander des comptes sur ses pratiques ruineuses. Les “scandales” seront nécessairement étouffés parce qu’ils sont l’expression d’une déprédation de nature “systémique”. Les affaires en question, même parvenues à leur terme judiciaire, ne peuvent rendre compte du réel dommage subi par le pays.
La mise à jour des mécanismes de mise à sac des ressources nationales nécessite un procès du système qui les a conçus et les entretient.
source libeté dz

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