L’agenda économique d’un sommet Algérie-France peut beaucoup bouger en 30 ans. Ou pas. La première différence est stratégique. L’Algérie n’est plus perçue en France comme un grand fournisseur d’hydrocarbures sécurisant dans le long terme le bilan énergétique hexagonal. Le prix d’achat du gaz naturel était l’un des centres de la visite historique de François Mitterrand il y a trente ans. François Hollande n’aura pas à en parler. Les quantités de gaz naturel que vendra l’Algérie à la France les dix prochaines années iront déclinantes. Et encore plus la part de la source de fourniture algérienne dans le mix-énergétique français.
Episode technico-commercial, Gaz de France s’alignera bientôt sur les autres clients de Sonatrach en quête de révision à la baisse des tarifs de vente du gaz algérien dans les contrats de longues durées, sapées par la dépression des cours sur les marchés spot du gaz. Si les hydrocarbures tendront à ne plus cannibaliser le cœur de l’échange économique entre les deux pays à l’horizon 2020, l’énergie, elle, est toujours essentielle dans la relation entre les deux pays. Elément de continuité. La France milite pour que l’Algérie introduise la source nucléaire dans son mix-énergétique. Et Alger compte sur Paris pour lui apporter plus de garanties européennes sur la future demande d’électricité d’origine solaire que le Sahara va inexorablement produire à échelle d’exportation dans les 15 prochaines années. Le champ des enjeux se déplace.
L’exportation de l’électricité va progressivement compléter, puis supplanter celle du gaz naturel. Le gel du projet de gazoduc Galsi d’exportation vers la Sardaigne n’est pas un seul effet de conjoncture, lié à la rentabilité financière du projet. C’est aussi l’expression d’un vrai malaise sur la capacité de l’Algérie à mobiliser quelques milliards de m3 supplémentaires tous les ans pour de nouveaux clients. D’ou le changement de perception de Paris. Il y a trente ans, lors de la visite de l’autre François, les gros contrats de services et de réalisation étaient l’autre versant du dossier économique. Le pétrole, comme aujourd’hui, était à des plus haut, après le déclenchement de la guerre Irak-Iran. Bouygues était alors le premier gagnant de la «diversification» de l’ère Chadli.
Durant les années Bouteflika, les entreprises françaises, 450 en Algérie, n’auront pas été les plus mal loties en conquête de marchés publics. Rien qu’à Alger, l’eau avec Suez, l’aéroport avec ADP et le métro avec la RATP sont gérés par des labels français. Vinci et Alstom réalisent et équipent une majorité des projets de mobilité urbaine (tramway, extension métro). La montée en puissance de la présence de la Chine demeure encore relative hors bâtiment et travaux publics. Les chinois ne délocalisent pas facilement. Pas de gains en coûts en venant au Maghreb. Les chefs d’entreprise français auraient dû le faire un peu plus. C’est depuis dix ans le point d’achoppement de l’agenda économique entre les deux capitales.
Les Français se défendent d’être petit-bras lorsqu’il s’agit d’investir en Algérie. Les premières banques privées dans le pays sont françaises. Et AXA a fini par accepter le principe d’être à 49% alors qu’il était engagé en Algérie fin 2008 sur la base d’un investissement de filiale à 100%. Alger rétorque que les secteurs de forte présence française, comme le fret maritime (CMA-CGM) ou de distribution automobile sont, comme la banque et l’assurance, des niches de valeurs sans grandes incidences sur le développement du partenaire algérien. Le fond de l’affaire est donc dans l’industrie.
Lafarge a fait certes une percée remarquable dans le ciment et dérivés. Et Sanofi, désormais première capitalisation boursière du CAC 40, investit en Algérie. Mais Alger trouve encore que le compte n’y est pas. Sans jamais se poser la question de sa responsabilité dans la faiblesse du stock des investissements industriels français en Algérie, 50 ans après l’indépendance. Cela n’est pas près de changer avec la gouvernance économique actuelle, retournée au pire de l’esprit rentier public de l’ère du pétrole à 40 dollars du sommet Chadli-Mitterrand. D’un François à l’autre, beaucoup de choses ont bougé. Pour revenir parfois à la case départ. A Alger. La France est une puissance économique en crise. Elle est devenue sourcilleuse sur la délocalisation de ses savoir-faire et de ses emplois.
Plus anglo-saxonne en négociations. Il n’y aura pas de prix d’achat politique du gaz algérien comme il y a trente ans. Il faudra être inventif pour capter de nouveaux engagements industriels français en Algérie. En-dehors de Total dans la pétrochimie, ou de Renault dans le low coast automobile. Mais à bien y regarder, le partenariat économique entre l’Algérie et la France se trouve, peut-être, là ou il doit être. Entre un pays qui n’arrive pas à émerger sous le poids de sa gérontocratie, et un autre qui recule lentement sous le fardeau de son histoire.
Episode technico-commercial, Gaz de France s’alignera bientôt sur les autres clients de Sonatrach en quête de révision à la baisse des tarifs de vente du gaz algérien dans les contrats de longues durées, sapées par la dépression des cours sur les marchés spot du gaz. Si les hydrocarbures tendront à ne plus cannibaliser le cœur de l’échange économique entre les deux pays à l’horizon 2020, l’énergie, elle, est toujours essentielle dans la relation entre les deux pays. Elément de continuité. La France milite pour que l’Algérie introduise la source nucléaire dans son mix-énergétique. Et Alger compte sur Paris pour lui apporter plus de garanties européennes sur la future demande d’électricité d’origine solaire que le Sahara va inexorablement produire à échelle d’exportation dans les 15 prochaines années. Le champ des enjeux se déplace.
L’exportation de l’électricité va progressivement compléter, puis supplanter celle du gaz naturel. Le gel du projet de gazoduc Galsi d’exportation vers la Sardaigne n’est pas un seul effet de conjoncture, lié à la rentabilité financière du projet. C’est aussi l’expression d’un vrai malaise sur la capacité de l’Algérie à mobiliser quelques milliards de m3 supplémentaires tous les ans pour de nouveaux clients. D’ou le changement de perception de Paris. Il y a trente ans, lors de la visite de l’autre François, les gros contrats de services et de réalisation étaient l’autre versant du dossier économique. Le pétrole, comme aujourd’hui, était à des plus haut, après le déclenchement de la guerre Irak-Iran. Bouygues était alors le premier gagnant de la «diversification» de l’ère Chadli.
Durant les années Bouteflika, les entreprises françaises, 450 en Algérie, n’auront pas été les plus mal loties en conquête de marchés publics. Rien qu’à Alger, l’eau avec Suez, l’aéroport avec ADP et le métro avec la RATP sont gérés par des labels français. Vinci et Alstom réalisent et équipent une majorité des projets de mobilité urbaine (tramway, extension métro). La montée en puissance de la présence de la Chine demeure encore relative hors bâtiment et travaux publics. Les chinois ne délocalisent pas facilement. Pas de gains en coûts en venant au Maghreb. Les chefs d’entreprise français auraient dû le faire un peu plus. C’est depuis dix ans le point d’achoppement de l’agenda économique entre les deux capitales.
Les Français se défendent d’être petit-bras lorsqu’il s’agit d’investir en Algérie. Les premières banques privées dans le pays sont françaises. Et AXA a fini par accepter le principe d’être à 49% alors qu’il était engagé en Algérie fin 2008 sur la base d’un investissement de filiale à 100%. Alger rétorque que les secteurs de forte présence française, comme le fret maritime (CMA-CGM) ou de distribution automobile sont, comme la banque et l’assurance, des niches de valeurs sans grandes incidences sur le développement du partenaire algérien. Le fond de l’affaire est donc dans l’industrie.
Lafarge a fait certes une percée remarquable dans le ciment et dérivés. Et Sanofi, désormais première capitalisation boursière du CAC 40, investit en Algérie. Mais Alger trouve encore que le compte n’y est pas. Sans jamais se poser la question de sa responsabilité dans la faiblesse du stock des investissements industriels français en Algérie, 50 ans après l’indépendance. Cela n’est pas près de changer avec la gouvernance économique actuelle, retournée au pire de l’esprit rentier public de l’ère du pétrole à 40 dollars du sommet Chadli-Mitterrand. D’un François à l’autre, beaucoup de choses ont bougé. Pour revenir parfois à la case départ. A Alger. La France est une puissance économique en crise. Elle est devenue sourcilleuse sur la délocalisation de ses savoir-faire et de ses emplois.
Plus anglo-saxonne en négociations. Il n’y aura pas de prix d’achat politique du gaz algérien comme il y a trente ans. Il faudra être inventif pour capter de nouveaux engagements industriels français en Algérie. En-dehors de Total dans la pétrochimie, ou de Renault dans le low coast automobile. Mais à bien y regarder, le partenariat économique entre l’Algérie et la France se trouve, peut-être, là ou il doit être. Entre un pays qui n’arrive pas à émerger sous le poids de sa gérontocratie, et un autre qui recule lentement sous le fardeau de son histoire.
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